Le PETR du pays de Bray est situé en Seine-Maritime, au-dessus de Rouen. Nous regroupons trois communautés de communes et travaillons pour 115 communes regroupant 66 000 habitants. Le PETR porte depuis maintenant trois générations, soit depuis 2000, le programme LEADER. Aussi, nous commençons à avoir une expérience approfondie de ce dernier. Parallèlement, nous nous sommes également positionnés en tant qu'animateur d'une zone Natura 2000. Nous gérons à ce titre des crédits du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) depuis 2011. Enfin, depuis 2015, nous sommes volontaires pour porter un projet agroenvironnemental et climatique qui nous conduit à gérer des mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC). Nous avons donc une bonne vision de la gestion du FEADER à l'échelle de la région Normandie. En revanche, je ne pourrai pas vous donner des informations concernant le Fonds social européen (FSE) ni le Fonds européen de développement régional (FEDER), avec lesquels nous ne travaillons pas.
Nous n'arrivons pas encore à percevoir si le dysfonctionnement que nous subissons actuellement résulte du transfert aux régions de l'autorité de gestion des fonds européens, ou s'il est plus général. Nous sommes en effet conscients que les crédits LEADER et FEADER ne sont ni simples ni faciles d'accès.
Toutefois, nous avons constaté, pour la région Normandie, une adoption des programmes de développement rural (PDR) avec un an et demi de retard. Cette région a entamé sa programmation à partir de janvier 2018, soit avec quatre ans de retard. Nous avons constaté une non-anticipation de cette nouvelle compétence de gestion, ainsi qu'un transfert quasi-inexistant des agents compétents des services de l'État vers les nouvelles autorités de gestion. Nous avons dès lors été confrontés, en début de programmation, à un problème d'ingénierie dédiée et qualifiée.
La fusion des régions en cours de programmation a créé une véritable cacophonie. Les régions se sont concentrées sur la nécessaire réorganisation interne de leurs administrations, au détriment d'un certain pragmatisme dans la gestion des fonds européens. En outre, nous avons été confrontés à une défaillance importante du logiciel OSIRIS qui gère le programme LEADER et les MAEC. Cet outil de gestion n'étant pas opérationnel, nous avons été livrés progressivement, mesure par mesure. Par exemple, l'outil dédié à la coopération LEADER, qui est une mesure obligatoire de ce programme, n'a été livré à la région Normandie qu'au moins de janvier 2019. Avant cette date, nous étions incapables de développer un projet de coopération. Aujourd'hui encore, le cadre réglementaire est très mouvant. Or, toutes ces difficultés sont très difficiles à expliquer sur le terrain. Ainsi, en raison de ce cadre encore instable, les agriculteurs « essuient les plâtres » pour les MAEC.
Les retards d'instruction, de programmation et de paiement pour les projets LEADER et les MAEC sont très importants, entre deux et trois ans. Or, de tels délais ne sont pas tenables pour les structures qui gèrent les programmes et les financent. Au mois de juillet de l'année dernière, j'avais en attente pour ma structure 500 000 euros de subventions au titre des exercices précédents. Je n'avais plus de trésorerie disponible pour payer les salaires de mes agents et j'ai dû ouvrir une nouvelle ligne de trésorerie dans l'attente des fonds européens. Si les collectivités peuvent, dans une certaine mesure, faire face à ce retard de trésorerie, ce problème est particulièrement critique pour les agriculteurs et les associations.
Certes, on constate depuis un an une amélioration dans l'instruction et le paiement, mais celle-ci n'est pas suffisante pour rattraper le retard accumulé. Aussi sommes-nous très inquiets pour la fin de la programmation. La Normandie a mis en place des « dialogues de gestion ». Elle souhaite nous imposer des objectifs de programmation et de paiement, en raison du risque de dégagement d'office, mais nous les jugeons intenables. Si la région arrive à introduire ces objectifs auprès des GAL, le programme LEADER, en Haute-Normandie, aura été programmé en un an et demi, alors que la durée normale du programme est de sept ans.