Intervention de Éric Ginter

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 5 juin 2012 : 1ère réunion
Audition de Mme Manon Sieraczek avocate fiscaliste et de Mm. éric Ginter associé au cabinet stc partners kpmg gianmarco monsellato managing partner de taj société d'avocats membre de deloitte et touche tohmatsu limited pierre-sébastien thill président du directoire de cms francis lefebvre et michel combe associé responsable de landwell et associés

Éric Ginter, associé au cabinet STC partners (KPMG) :

Comme le disait un professeur de droit bien connu, je n'ai jamais déjeuné avec une personne morale ! Je ne pense pas qu'une société située aux îles Vierges britanniques ou au Panama soit capable de gérer des milliards de dollars, des actifs financiers très importants. Mesdames, messieurs les sénateurs, lors de votre déplacement à Jersey, vous vous apercevrez que, en réalité, les sociétés en cause sont gérées depuis les grandes places financières. Le vrai problème ne se situe ni à Jersey, ni au Panama, ni au Liberia. Savez-vous par qui et où est tenu le registre des bateaux immatriculés dans ce dernier pays ? C'est un cabinet d'avocats qui s'en occupe à New York ! En réalité, c'est devant la porte des pays développés, des grandes places financières qu'il faut balayer ! C'est aussi en déterminant ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas que l'on pourra traiter le problème posé.

J'en viens au projet suisse Rubik, dont on peut penser ce que l'on veut. Il existe d'ores et déjà la directive « Épargne », dont le principe est le même que celui du projet Rubik. Ainsi, la banque doit effectuer un prélèvement à la source sur les revenus qu'elle verse à des ressortissants des États de l'Union européenne puis elle transfère l'ensemble de ses prélèvements au Trésor suisse qui les reverse au Trésor français.

Or ce système n'a pas fonctionné. M. Parini a fait récemment part du montant ridicule que la France avait perçu à ce titre. En effet, les banques suisses ont appliqué de façon déloyale le système en cause, car elles ont transféré des actifs appartenant à tel ou tel sur des sociétés situées aux îles Vierges britanniques, au Panama, notamment.

La proposition de la Suisse, par le biais du système Rubik, est semblable. Il n'existe qu'une seule différence. La directive « Épargne » comporte un taux progressif alors que le projet Rubik prévoit un taux fixé en fonction de la fiscalité qui est applicable dans le pays destinataire. Ce taux, qui n'est pas forfaitaire, est différent en Allemagne, en Grande-Bretagne, etc.

Je partage totalement le point de vue des autorités fiscales françaises sur ce point : tout dépend de la confiance que l'on accorde à celui qui prélève les fonds. Lorsque j'ai discuté de ce problème avec M. Parini, je lui ai indiqué qu'il aurait un moyen très simple de s'assurer de la loyauté des Suisses, à savoir l'étude des sommes qui seront versées. Si tous les ans, ceux-ci reversent 2 milliards ou 3 milliards d'euros, on peut alors être certains qu'ils jouent le jeu.

Certes, les revenus ne sont pas seuls en cause. Il faut aussi prendre en considération les successions, l'ISF. Au moins, est-ce déjà un pas dans la bonne direction. Il revient aux autorités politiques de prendre les décisions. Techniquement, la mesure n'est pas complètement idiote.

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