Intervention de Thierry Jadot

Mission d'information sur le harcèlement scolaire et le cyberharcèlement — Réunion du 30 juin 2021 à 16h35
Audition d'un laboratoire d'idées du numérique et d'une plateforme de modération avec la participation de Mm. Thierry Jadot ancien président dentsu aegis network et contributeur aux travaux de l'institut montaigne et matthieu boutard directeur général de la plateforme de modération bodyguard

Thierry Jadot, ancien président, Dentsu Aegis Network et contributeur aux travaux de l'Institut Montaigne :

Je partage votre point de vue sur le fait que tous les outils mis à disposition, tant sur la protection des données personnelles, que les nouvelles politiques publiques, soient accessibles aux enfants. Cela signifie qu'ils doivent être exprimés avec les codes de communication des enfants. Or, une communication ayant pour objectif de simplement dire aux enfants ce qu'ils doivent faire ne peut fonctionner. Les politiques publiques doivent travailler à la mise à disposition d'une application sur le téléphone de l'enfant, la présence d'un bouton de signalement facile sur les applications et l'existence d'un numéro de téléphone accessible. Il faut se doter d'outils utilisant les codes de communication des enfants. Or ces codes s'éloignent progressivement des nôtres. Ces outils doivent permettre aux enfants de comprendre le fonctionnement de la protection des données personnelles dans le cadre du RGPD. Ceux-ci doivent également avoir connaissance des leviers qu'ils peuvent actionner dans ce cadre. En la matière, une approche communicative très formelle et autoritaire n'aura pas d'effet sur les enfants.

Je ne sais pas quelle réponse apporter sur la dégradation du discours à la télévision. Le CSA est sensible à ce sujet et reçoit de nombreuses plaintes à l'encontre de certaines chaînes. Une nouvelle fois, les pouvoirs publics doivent fournir un cadre juridique au sein duquel le CSA puisse agir et délivrer éventuellement des contraventions.

Nous n'avons pas abordé la dimension d'appartenance culturelle des publics. En effet, la cyberviolence diffère selon qu'elle ait lieu par exemple en Asie, en Europe ou aux États-Unis. Ainsi, les plateformes répondront toujours que la règle prévalente est celle du pays de leur siège social. Le code de bonne conduite européen établi en 2016 précise que les plateformes disposent d'une liberté d'action en la matière. Or, ces plateformes étant de droit extraterritorial, elles ne sont pas contraintes par le droit européen. À ce jour, la seule manière de contraindre les plateformes en matière de cyberharcèlement repose sur l'atteinte à leur réputation.

Enfin, je vous rejoins sur la nécessité de rendre accessibles et compréhensibles par les enfants leurs droits et des outils permettant l'exercice de ces droits, sans que ces enfants aient besoin de recourir à l'aide de leurs parents. Sur ce point, la réforme de l'Éducation nationale en 2019 crée des ambassadeurs dans les écoles afin que les enfants puissent trouver un interlocuteur.

Ces éléments vont dans le sens de la nécessité d'ériger le cyberharcèlement en grande cause nationale. Elle permettrait d'associer les médias sur ce sujet.

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