Intervention de Laurence Cohen

Commission d'enquête Hôpital — Réunion du 24 février 2022 à 14h00
Audition de M. Olivier Véran ministre des solidarités et de la santé

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Merci, Monsieur le ministre. Je ne vais pas revenir sur nos points de désaccord, dans la mesure où nous ne parviendrons pas à nous convaincre, mais je souhaite revenir sur certains de vos propos. Je m'appuie sur les auditions que nous avons pu avoir depuis le début de la commission d'enquête et le vécu des personnels de santé. Personnellement, j'ai été particulièrement frappée par l'état des urgences, ce qui correspond aux témoignages que j'ai reçus dans mon département. Ce n'est pas un problème nouveau, qui ne date pas de la crise sanitaire. Les urgences constituent un problème à ne pas traiter séparément du reste de notre système de santé. Je pense que nous sommes d'accord à ce sujet.

Il a été dénoncé le fait que lorsqu'on est urgentiste, on l'est à vie. Je vous avais interrogé à ce sujet ; vous considérez à juste titre que ce métier est particulièrement épuisant et qu'il faudrait ne pas l'être à vie. Il conviendrait dès lors de décloisonner cette spécialité d'urgence et de rétablir la capacité de la médecine d'urgence. Il s'agit de permettre à un médecin d'être urgentiste tout en travaillant dans un centre de santé. Je n'ai pas eu le sentiment dans vos propos que vous étiez hostile à cette perspective. Comment mettre en place ces mesures au niveau gouvernemental ?

Sur les urgences, nous constatons un affaiblissement du niveau 2, c'est-à-dire des hôpitaux de proximité tels qu'ils existaient par le passé. Des services d'urgences disparaissent ou doivent réduire leur temps d'ouverture, ce qui crée une catastrophe, compte tenu du maillage actuel de la médecine de ville. Comment y remédier ? Il me semble nécessaire de raisonner en filière de soins, mais nous en sommes loin.

Vous avez évoqué la formation. Il nous a été affirmé à plusieurs reprises que les médecins ou les infirmières bénéficieraient d'une formation de « moins bonne qualité ». Le nombre de professeurs disponibles pour enseigner est en diminution, ce qui est problématique. Compte tenu des conditions de travail dans les hôpitaux, la notion de compagnonnage a disparu. Ce compagnonnage assuré par les anciens n'est plus possible, en raison du nombre de professionnels qui exercent et du nombre de professeurs chargés d'enseigner. Nous avons auditionné des professionnels qui ont alerté sur la dimension catastrophique de la situation. 30 % des étudiantes et des étudiants infirmiers n'achèvent pas leurs études. Comment agir ? Au niveau de l'attractivité des métiers, ne faut-il pas prévoir un ratio entre patients/soignants et revenir sur les statuts ?

Enfin, nous avons été alertés à plusieurs reprises sur la gouvernance. Les soignants sont soumis ou démis dans de nombreux endroits. Le pouvoir des directions d'hôpital est absolu. Depuis la loi HPST, les médecins sont nommés par l'administration. Il en résulte beaucoup de souffrance au sein des personnels médicaux. Des médecins-chefs des urgences sont obligés de revenir de vacances pour assurer leur mission et ne reçoivent même pas un remerciement de leur direction. Il faut remettre de l'humain au sein de l'hôpital. Que comptez-vous faire pour remédicaliser la gouvernance ? La direction médicale doit être soutenue par un accompagnement administratif, nécessaire, mais non dominant. Dans mon esprit, il ne s'agit pas de donner le pouvoir aux médecins, mais au secteur médical dans son sens large en intégrant des élus et des usagers dans les conseils d'administration.

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