Je vous présente, pour ma part, les mécanismes de coordination et de surveillance des politiques économiques dans l'Union européenne, et les recommandations que le Conseil européen a fait ces dernières années pour financer la protection sociale.
Le semestre européen constitue le cadre renforcé de l'Union Européenne pour la coordination et la surveillance intégrées des politiques économiques et budgétaires des Etats Membres ; il est lancé chaque année avec l'examen annuel de la croissance, qui dresse le bilan de la situation économique et sociale en Europe, et arrête pour les Vingt-Huit, les priorités d'action de l'année à venir.
L'examen annuel de la croissance 2014, adopté le 13 novembre 2013, a établi deux priorités qui touchent aux exonérations de cotisations sociales : faire que les Etats membres disposant d'une marge de manoeuvre budgétaire stimulent les investissements privés et la consommation, par exemple au moyen de réductions d'impôts et de charges sociales ; rendre la fiscalité plus propice à la croissance, par exemple en déplaçant la charge fiscale pesant sur le travail vers des bases d'imposition liées à la consommation, le patrimoine et l'environnement.
Analysant la mise en oeuvre des recommandations depuis trois ans, l'examen annuel de la croissance 2014 constate que de nombreux Etats membres ont accru la pression fiscale globale - impôts directs et indirects et cotisations sociales - mais aussi que la charge fiscale se déplace quelque peu, en témoignent les réformes de la fiscalité de la propriété foncière et l'accent mis sur les impôts indirects plutôt que sur la fiscalité du travail.
Il apparaît également que le taux d'imposition maximal des revenus des personnes physiques est à son plus haut niveau depuis 2008. La charge fiscale globale qui pèse sur le travail s'est alourdie, mais la fiscalité du travail a diminué pour certaines catégories - en Belgique, au Danemark, en Finlande, en France, en Hongrie, en Italie, aux Pays-Bas, au Portugal et en Suède. De même, la progressivité de l'impôt tend à se renforcer.
Parallèlement à l'examen annuel de la croissance, la Commission adopte le Rapport sur le mécanisme d'alerte concernant les déséquilibres macroéconomiques (RMA), qui identifie les Etats membres justifiant une analyse plus détaillée, sous la forme d'un bilan approfondi.
Dans le bilan approfondi concernant la France, adopté le 10 de ce mois, les services de la Commission ont évalué que les coûts salariaux élevés, pèsent sur la rentabilité des entreprises et sur leur capacité à faire face aux chocs. Si, d'une manière générale, l'évolution des salaires a suivi celle de la productivité, la France fait partie des pays de la zone euro qui enregistrent les coûts salariaux les plus élevés. En particulier, l'importance de la charge fiscale sur le travail réduit la rentabilité des entreprises.
Toutefois, l'analyse démontre également l'importance de la compétitivité hors coûts tels que la qualité des produits, l'innovation, ou encore, les réseaux de distribution.
Au-delà de la mesure déjà adoptée pour réduire la charge fiscale sur le travail, des efforts supplémentaires doivent être déployés pour renforcer la rentabilité des entreprises. Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (Cice) équivaut pour les entreprises à une réduction des coûts salariaux de près de 20 milliards d'euros, soit 1 % du PIB. Cette mesure ne comble qu'une partie de l'écart de rentabilité qui sépare les entreprises françaises de leurs pairs de la zone euro. En outre, les réductions de coûts sont axées sur la tranche inférieure de la distribution des salaires. Cette orientation vise à maximiser l'effet sur l'emploi, mais réduit les effets sur les entreprises exportatrices qui versent généralement des salaires plus élevés.
La Commission européenne, faute d'éléments suffisamment précis, n'a pas pu inclure dans son analyse le pacte de responsabilité, annoncé en janvier dernier. La France devra en communiquer le contenu début mai dans son programme national de réforme et son programme de stabilité - comme pour les autres Etats membres, ce programme sert de base aux recommandations spécifiques par pays que la Commission pourrait ensuite proposer au Conseil, pour le mois de juin.
L'analyse dans le rapport conjoint sur l'emploi 2014, accompagnant également l'examen annuel de la croissance 2014, constate que la pression fiscale demeure élevée dans de nombreux Etats membres. La pression fiscale élevée et, dans certains cas, en hausse, qui pèse sur les bas salaires et les personnes apportant un second revenu, reste un problème dans un très grand nombre d'Etats membres. Les niveaux en 2012 allaient de 20 % ou moins à Malte et en Irlande à plus de 45 % en Belgique, en Allemagne, en France et en Hongrie.