Quand on parle de compétitivité, il faut avoir une vision globale et ne pas oublier que nous évoluons dans un cadre européen, où ne se pose pas seulement la question des coûts mais aussi celle de la demande. La baisse du taux de marge depuis deux ou trois ans tient au fait qu'alors que l'on avait une croissance nulle, la masse salariale a légèrement augmenté. Mais si les entreprises avaient ajusté leurs effectifs et baissé les salaires pour préserver leur taux de productivité, quelles auraient été les conséquences sur la demande en Europe ?
Deuxième élément, que souligne le Haut conseil de financement de la protection sociale, c'est que ce pas en France, mais en Allemagne que l'on a observé, au cours de la dernière période, une situation atypique, en particulier dans les services. Le taux de cotisation employeur, en France, n'a pas augmenté sur la longue période. On ne peut donc en faire la cause de notre perte de compétitivité.
Sur ce sujet, il faut raisonner par branche. C'est dans notre industrie que se concentre la perte de compétitivité : équipements de transports, biens intermédiaires, biens d'équipement. Et l'on est hors de capacité de jouer sur les prix, ce qui renvoie au problème de la compétitivité hors coûts. La question n'est pas de savoir s'il faut ou non exonérer les services d'aide à la personne. Ce qui doit nous préoccuper, c'est l'effondrement, en trente ans, de la part de l'industrie dans le PIB en France, contrairement à ce qui s'est passé en Allemagne.
Il est très complexe de chiffrer l'impact sur l'emploi des exonérations. Les exonérations Aubry ont combiné une action sur le coût du travail et une action sur la réduction du temps de travail. On a donc du mal à en isoler les effets. Or, il est très difficile de développer des raisonnements a contrario quand on n'a pas une vision claire de la situation antérieure. Si bien que les économistes ne savent mesurer que l'effet des exonérations intervenues dans les années 1990.
Nous ne disons pas qu'il faut supprimer les exonérations ex abrupto, mais en se replaçant dans le cadre d'une réforme globale du financement de la protection sociale, en envisageant, ainsi que nous le proposons, une modulation des cotisations, tenant compte de la part des salaires, de la valeur ajoutée et du comportement des entreprises en termes d'emploi.
Dans les services, si certains salariés, comme ceux de la banque ou de l'assurance, sont très bien payés, la majorité le sont très mal. Ils le sont mieux dans l'industrie. Or, c'est elle qui tire la croissance.