Intervention de Olivier Passet

Mission commune d'information impact emploi des exonérations de cotisations sociales — Réunion du 7 mai 2014 à 15h45
Audition de M. Olivier Passet directeur des synthèses économiques du groupe xerfi

Olivier Passet, directeur des synthèses économiques du groupe Xerfi :

Je ne dis pas cela, mais simplement qu'elle ne règle pas tout. Le résultat empirique est là, mais la conception du modèle productif français qui sous-tend ce type de mesures est inquiétante. Le chômage peut toucher à 17 % un métier comme la communication où le salaire excède facilement 3,5 Smic.

Abordant des terrains moins solides, cette zone de subjectivité et d'incertitude que j'évoquais au début de mon intervention, il faut dire quels sont les objectifs et le diagnostic. Le problème de compétitivité que rencontre la France est dû selon moi à une base productive fragilisée et à un problème d'insertion sur le marché mondial. Tant que ces problèmes ne seront pas résolus, les forces déflationnistes, défensives, d'ajustement des coûts de production par le niveau des salaires, continueront à l'emporter. Si l'on admet qu'il s'agit d'un problème d'offre, cela change les outils pertinents pour régler le problème du chômage. Lionel Fontagné met l'accent à juste titre sur la démographie des entreprises, les problèmes de taille, de positionnement de gammes, de spécialisation. Aucune étude sur le coût de travail ne parle malheureusement de l'influence de la structure de l'économie sur la croissance, comme si toutes les économies réagissaient de la même façon.

Suivant le modèle de la croissance endogène, je suis favorable au développement des secteurs à forte valeur ajoutée, capables de diffuser leur fort contenu en savoir, en compétence, sur l'ensemble des autres secteurs par des effets d'entraînement. On ne peut attendre un tel entraînement des emplois peu qualifiés du commerce ou de la restauration. En revanche, si vous avez une plate-forme comme Amazon sur votre territoire - même si ce n'est pas forcément une bonne affaire d'un point de vue fiscal - cela crée à la fois quelques emplois d'ingénieurs hyper-qualifiés et beaucoup d'emplois dans la logistique ou l'entreposage. Les économistes manquent souvent de cette vision dynamique, au risque de promouvoir un subventionnement systématique des emplois peu qualifiés par la ponction des plus qualifiés.

J'aurais préféré un ciblage plus neutre que celui retenu par le Gouvernement. Je ne vais pas jusqu'à considérer qu'une baisse de 10 % des bas salaires, donc de 4 % du coût du travail global, ne représentant une baisse qu'1 % à 2 % de la valeur ajoutée, n'équivaut à une dévaluation que de quelques centimes. Une baisse de 4 % du coût du travail est extrêmement importante, et, contrairement à une dévaluation monétaire, elle n'est pas compensée en partie par une hausse du coût des achats importés. Cela peut être un choc extrêmement important sur les secteurs à forte valeur ajoutée, d'autant plus qu'il modifie la compétitivité par rapport à l'ensemble des marchés extérieurs, y compris européens. Il s'agit donc d'une dévaluation fiscale, dont la France a besoin. C'est une arme conjoncturelle utile, une bouffée d'oxygène utile pour les entreprises, même si des politiques structurelles doivent l'accompagner, notamment concernant l'investissement. Une baisse des charges uniquement sur les bas salaires équivaut à une relance par la consommation. Une baisse des charges plus diffuse a un rôle à jouer.

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