Le travail réalisé est en outre extrêmement technique : la lecture de rapports tels que celui de la catastrophe du Mont Sainte-Odile ou du scandale du Médiator nécessitent un dictionnaire en permanence.
Je passe sur la méthode pour vous présenter les résultats qui me semblent les plus importants.
La lecture de la totalité des rapports donne le sentiment d'une inéluctabilité de l'événement. C'est comme si tout un ensemble d'éléments divers concordaient pour que la crise apparaisse, de manière inéluctable. Le mot qui revient le plus fréquemment dans les rapports est « conjonction ». Ceci est d'autant plus intéressant qu'immédiatement après une crise, nous tendons à penser qu'il n'existe qu'une cause unique, un seul responsable. Or l'analyse montre que la cause n'est jamais unique. Ainsi, la catastrophe de BP est due à la conjonction de six types de problèmes différents et de neuf causes. Pour le Médiator, la commission d'enquête de l'IGAS a déterminé six facteurs déclenchant. J'avais également analysé le retard de quatorze heures d'un train SNCF, dû à cinq causes différentes. Dans le cas des épisodes neigeux, sept causes ont été recensées. L'important est que la causalité est toujours extra disciplinaire ; elle appartient systématiquement à des champs de compétence bien distincts. Alors qu'il existe de nombreuses causes différentes, la lecture des rapports donne le sentiment d'une absence de pilotage global. Cela donne l'impression de plaques tectoniques de nature différente entrant en collision, chacune d'elle pouvant être pilotée mais pas l'ensemble. J'ai constaté qu'à des contrôles administratifs distincts et à des empilements de textes juridiques, vient généralement s'ajouter un événement déclencheur. Comme vous l'avez sans doute vu pour les inondations, la cause n'est pas unique. Elles sont probablement dues à la conjonction d'un événement climatique avec des problèmes d'entretien des digues, d'érosion des sols, etc.