Peut-être faudrait-il cependant s'interroger sur le facteur humain, car le facteur psychologique de la réaction individuelle en temps de crise a son importance.
Avant de venir, j'ai regardé quelques rapports sur les inondations, sujet que je ne connaissais pas. J'ai constaté qu'ils étaient nombreux. J'ai notamment lu le rapport Galley de 2001 sur les inondations de la Somme ou celui de Thierry Mariani en 1994. Bien que n'étant pas entré dans le détail, j'ai l'impression que les conclusions de mon étude sur les commissions d'enquêtes sont valables pour les inondations. Dans chaque cas, c'est un ensemble de facteurs qui, mis bout à bout, ont contribué à la crise.
Cela me fait penser à la focalisation qui a pu être faite à un moment donné sur l'alerte. L'analyse des crises montre qu'assez souvent, l'alerte a été donnée sans être suivie d'effet. De nombreux exemples en témoignent. Dans le cas de BP, toutes les alertes avaient été lancées. Pour l'explosion de la navette Challenger, l'alerte lancée par les ingénieurs de la NASA n'a pas été écoutée, au prétexte qu'il fallait savoir prendre des risques pour ne pas se faire dépasser par l'Europe ou le Japon. Il semble donc nécessaire de travailler non seulement sur la capacité à donner l'alerte, mais également sur la boucle de rétroaction. Il faut en effet veiller à ce que l'alerte soit prise en compte par les décideurs, parfois occupés par d'autres urgences.
J'ai également constaté que beaucoup de travaux sur les inondations excluent le risque climatique. Les experts interrogés estiment en effet ne pas être en mesure d'affirmer que les événements sont liés au dérèglement climatique. Or le 28 mars dernier, le groupement international d'expert sur le climat (GIEC) a rendu pour la première fois un rapport selon lequel il existe une probabilité pour que le dérèglement climatique amplifie les risques d'événements extrêmes tels que les vagues de chaleur ou de froid, les inondations ou encore les tempêtes. Le document de synthèse d'une vingtaine de pages à l'usage des décideurs, qui évoque un dérèglement climatique et non un réchauffement, les invite à travailler sur la question de la vulnérabilité des populations. En conclusion, le GIEC recommande que les travaux sur les phénomènes météorologiques extrêmes se fassent en lien avec l'adaptation aux risques climatiques.