Intervention de Jean-Baptiste Carpentier

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 3 avril 2012 : 1ère réunion
Audition de Mm. Jean-Baptiste Carpentier directeur du service traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins et yves ulmann directeur adjoint

Jean-Baptiste Carpentier, directeur du service Traitement de l'information et action contre les circuits financiers clandestins :

M. Ulmann vous répondra sur les nouvelles technologies, mais je souhaiterais auparavant répondre à la question portant sur le taux de suite des informations que nous transmettons aux autorités judiciaires.

Nous ne disposons que d'éléments assez partiels : le suivi de nos dossiers est assez compliqué - ayant été moi-même magistrat, je ne jette pas la pierre à mes anciens collègues ! Nous savons que les dossiers transmis par TRACFIN sont très rarement classés sans suite. Le suivi dans la durée est beaucoup plus difficile et nous ne disposons pas d'informations précises sur le sujet.

Vous m'avez également demandé si nos effectifs étaient suffisants : cette question n'a pas de réponse ! Dans la période compliquée que nous vivons, les effectifs ne sont jamais suffisants ; néanmoins, je me flatte de diriger l'un des rares services de Bercy qui, non seulement, n'a pas été soumis à la règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, mais encore a vu ses effectifs croître de près de 30 % en trois ans : je serais donc mal placé pour me plaindre ! Nous disposons peut-être d'une marge de croissance, mais, à missions constantes, nos effectifs correspondent à un standard international correct, alors que nous en étions encore très éloignés il y a quelques années.

Enfin, vous m'avez également interrogé sur notre collaboration avec nos homologues étrangers : celle-ci dépend desdits homologues - nous travaillons d'autant mieux avec un partenaire que nos relations avec lui sont fréquentes -, de leur système juridique - il ne nous appartient pas de donner des leçons de droit à la terre entière -, et de leurs pratiques. Nous collaborons de mieux en mieux avec les membres de l'Union européenne, et la France a mené une action très importante pour utiliser les cellules de renseignement financier à leur pleine mesure - car il s'agit d'une création du GAFI, transposée par une directive de l'Union européenne. Yves Ulmann a réalisé un travail très important pour développer cet outil au sein de l'Union européenne.

La cartographie des pays coopératifs en matière de lutte contre le blanchiment n'est pas nécessairement la même que celle des pays coopératifs en matière fiscale ou en matière judiciaire. Nous travaillons très facilement avec certains pays qui ont, par ailleurs, une mauvaise réputation en matière d'entraide pénale internationale, alors que nous travaillerons mal avec d'autres pays qui ont pourtant de bons échanges avec nous en matière de coopération judiciaire ou fiscale.

En ce qui concerne les nouvelles technologies, avant de laisser la parole à Yves Ulmann, je préciserai qu'elles représentent parfois une aide pour nous, car elles permettent une meilleure traçabilité des flux financiers. J'ai déjà eu l'occasion d'écrire que je détestais l'argent liquide : je n'ai toujours pas compris comment l'on pouvait détenir légalement 3 000 euros en liquide en France ! Par construction, l'argent liquide ne permet pas d'établir une traçabilité, or l'essence même du blanchiment consiste à rendre impossible l'établissement du lien entre une somme d'argent et sa source. L'argent liquide n'a pas d'odeur, alors que l'argent électronique laisse au moins une trace ! Une des raisons pour lesquelles la France est peut-être un peu moins concernée que d'autres pays par le phénomène de l'empilage réside dans son taux très élevé de bancarisation - 97 %, si mes souvenirs sont bons : notre pays est l'un des plus bancarisés d'Europe, et même du monde. Ce taux de bancarisation fait que la quasi-totalité des flux sont écrits, enregistrés, transmis et surveillés, ce qui facilite énormément notre travail.

Néanmoins, les nouvelles technologies sont également à l'origine de nouveaux risques et Yves Ulmann pourra vous parler des travaux que nous avons engagés depuis quelques mois sur la monnaie électronique.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion