Intervention de Michèle Bellon

Commission d'enquête sur le coût réel de l'électricité — Réunion du 21 mars 2012 : 1ère réunion
Audition de Mme Michèle Bellon président du directoire d'électricité réseau distribution france erdf

Michèle Bellon, président du directoire d'Électricité Réseau Distribution France (ERDF) :

Au début, il a fallu renforcer le réseau de distribution ; puis, lorsque l'interface avec RTE arrive à saturation, il devient nécessaire de renforcer le réseau RTE.

La seconde catégorie, celle qui concourt à la meilleure performance et à la modernisation du réseau, consiste, en fait, à améliorer le patrimoine, à rénover le réseau basse et moyenne tension, à enfouir les lignes là où cela se justifie, à remplacer les câbles souterrains vétustes, notamment en zones urbaines.

La baisse des investissements entre 1995 et 2005 a conduit à une lente dégradation de la qualité des réseaux. Elle a entraîné une augmentation du temps moyen annuel de coupure par client entre 2002 et 2009. Ce temps moyen, hors événements exceptionnels comme les tempêtes, est passé de 42 minutes en 2002 à 85 minutes en 2009. Rappelons que ce même indicateur, qui fait l'objet d'une normalisation, était de l'ordre de 400 minutes dans les années quatre-vingt, mais il est vrai que, à l'époque, la dépendance à l'électricité n'était pas la même. Cette diminution des investissements trouve son origine dans la baisse de plus de 25 % des tarifs en euros constants entre 1993 et 2005.

À partir de 2005, les investissements sont repartis à la hausse. En 2010, nous avons réussi à stabiliser le temps de coupure, et la tendance est aujourd'hui inversée. Je suis donc fière des résultats qu'ERDF a obtenus en 2011 ; le temps moyen de coupure, hors événements exceptionnels, s'est établi à moins de 71 minutes. Il est de 73 minutes, toutes causes confondues, en baisse de 39 % par rapport à 2010.

Avec ces résultats, nous sommes dans le peloton de tête en Europe, en ayant sans aucun doute le meilleur rapport qualité-prix. En effet, selon une étude Eurostat de 2009, et dans l'ordre décroissant des prix, le tarif d'acheminement français se classe en vingtième position sur vingt-sept. D'après cette même étude, le tarif d'acheminement moyen allemand est supérieur de 40 % à celui de la France.

Les résultats de 2011 sont la conséquence de plusieurs facteurs : une reprise significative des investissements ; une mobilisation extraordinaire de l'ensemble du personnel dans un climat social apaisé, je tenais à le souligner ; enfin, une optimisation des dépenses d'exploitation.

Les investissements ont doublé entre 2005 et 2012, passant de 1,5 milliard d'euros à 3 milliards d'euros en 2012, en euros courants, ce qu'a permis une hausse significative du tarif d'acheminement.

Par ailleurs, au-delà de ce temps moyen de coupure annuel, il est tout aussi important de réduire les disparités entre les zones rurales et les zones urbaines. Nous oeuvrons en ce sens et nous avons bien progressé en 2011, mais il reste encore beaucoup à faire.

En 2010, le temps de coupure, toutes causes confondues, avait été de plus de 700 minutes dans le Loir-et-Cher, largement touché par la tempête Xinthia et par les épisodes de neige collante de la fin de l'année 2010. En 2011, le département le plus touché a été le Morbihan, très atteint lors de la tempête Joachim, avec 193 minutes de temps de coupure.

Pour inscrire dans la durée cette amélioration de la qualité du service public qu'attendent nos concitoyens, il nous faut impérativement poursuivre sur cette voie, et surtout être constants dans nos efforts. Ce dont le réseau a le plus souffert, ces dernières années, c'est de la baisse des investissements. Il faut éviter, dans les dix prochaines années, l'effet yo-yo, l'approche court-termiste dans les décisions d'investissement et les fluctuations. La dimension industrielle des réseaux électriques impose stabilité et visibilité. Le maintien d'une politique d'investissements régulière, avec les moyens techniques et humains qui permettent sa mise en oeuvre, est indispensable pour améliorer le réseau, préparer l'avenir et tendre vers un temps de coupure raisonnable, de l'ordre de 60 minutes.

Pour donner une estimation de nos besoins dans les dix prochaines années, les incertitudes sont telles qu'il est nécessaire de prendre quelques précautions oratoires, tant l'exercice est difficile. Néanmoins, toutes les analyses s'accordent pour estimer que les évolutions des systèmes électriques générés par l'évolution des mix énergétiques vont nécessiter des investissements considérables dans les réseaux de distribution comme dans ceux du transport.

Nous estimons les besoins d'investissements sur le réseau de distribution entre 40 milliards et 45 milliards d'euros pour les dix années prochaines, hors Linky. Cette fourchette s'explique de la façon suivante : le montant de 40 milliards d'euros correspond à une hypothèse de développement des énergies renouvelables, les ENR, conforme à la programmation pluriannuelle des investissements, la PPI, et une hypothèse de flotte de 500 000 véhicules électriques à l'horizon de 2022 et à législation constante ; l'autre extrême - 45 millions - serait atteint si le véhicule électrique devait voir son développement confirmé par rapport à l'hypothèse du Livret vert du sénateur Louis Nègre, c'est-à-dire si le nombre de véhicules électriques atteignait 2 millions, ce qui représenterait pour nous 2 milliards d'euros d'investissements supplémentaires, c'est-à-dire, grosso modo, 1 000 euros par véhicule électrique.

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