Intervention de Hakim El Karoui

Commission d'enquête Combattre la radicalisation islamiste — Réunion du 4 février 2020 à 15h40
Audition de représentants de l'association musulmane pour l'islam de france amif sera publié ultérieurement

Hakim El Karoui, chef d'entreprise, essayiste :

L'AMIF n'est pas une organisation de masse, elle a vocation à réguler des marchés et à collecter de l'argent pour le réinvestir en associant l'ensemble des parties prenantes musulmanes. Pour cela, pas besoin d'avoir un nombre important d'adhérents. Compte tenu de la sensibilité du sujet, il est important de savoir qui sont les membres et de les avoir choisis avec précaution. Le budget de l'AMIF est de zéro euro. Il n'y a pas de financement de l'État ni de financements extérieurs.

Elle a pour ambition de réguler, donc de rendre un service qu'elle pourra faire rémunérer, avec pour objectif de réinvestir le produit net. Tant qu'elle n'est pas entrée dans le champ de la régulation du pèlerinage, du hallal ou d'autres activités économiques liées à l'islam, elle n'aura pas de budget. Elle n'a pas de permanent et ne travaille qu'avec des bénévoles. Son conseil, son bureau ne sont constitués que de bénévoles : il ne s'agit pas de gagner de l'argent, l'AMIF n'est pas un business, pas plus que l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes (Arcep), par exemple. Elle se veut un régulateur à but non lucratif, qui socialisera le produit de son travail. L'association cultuelle, elle, a vocation à recueillir des dons.

L'idée est d'avancer de façon incrémentale. Pour être légitime en n'étant pas représentatif, il faut avoir prouvé son utilité. Pour avoir l'occasion de le faire, nous voulons commencer par le pèlerinage. Pourquoi ? Parce que les prix du pèlerinage sont très importants en France, avec une chaîne de valeur qui ne fonctionne pas, des agences qui sous-traitent des rabatteurs et commercialisent des visas qui devraient être gratuits. Contrairement au reste de l'Europe, une seule offre est proposée aux pèlerins français. Bref, il faut essayer d'y voir plus clair - c'est d'ailleurs une demande des fidèles. Quand nous aurons ainsi fait la preuve, auprès des fidèles, de nos qualités professionnelles et de notre transparence, nous pourrons passer au hallal, avant de faire valoir la nécessité de former des imams. Il faut favoriser la recherche théologique, avec des gens capables d'aller sur les réseaux sociaux pour contrer la propagande salafiste.

Pour cela, nous pouvons faire un appel aux dons, mais, sans légitimité, nous n'en recueillerons guère. Quand nous aurons régulé un marché, que nous aurons prouvé l'utilité de nos services, nous inspirerons davantage confiance. C'est ainsi que beaucoup de musulmans ne veulent pas donner à leur mosquée parce qu'ils ne savent pas où va l'argent. Servir de tiers de confiance, c'est très important. Il y a des centaines de comptes de mosquées fermés par les banques pour des raisons de compliance, parce qu'elles voient des espèces déposées ou de l'argent viré depuis l'étranger. Ainsi, une structure qui contribue à l'organisation, à l'assainissement et à la transparence serait très utile. On ne peut se satisfaire de la situation catastrophique actuelle : l'inaction ne saurait être la solution dans le moment de crise où se trouve l'islam en France. Il faut s'engager pour essayer de mettre en place des structures, ce qui sera l'un des éléments de lutte contre la radicalisation.

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