Intervention de Cédric O

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 8 octobre 2020 à 14h30
Audition de m. cédric o secrétaire d'état chargé de la transition numérique et des communications électroniques

Cédric O, secrétaire d'État :

J'ai avancé un chiffre de téléchargements, donc un chiffre brut. Je vous confirme que l'on doit être aujourd'hui autour de 1,1 million d'installations.

S'agissant de la comparaison entre StopCovid et le Health Data Hub, avant de revenir sur les raisons du choix de Microsoft par les équipes du HDH, je voudrais rappeler que si nous avions choisi de passer par Apple et Google, les éléments que vous évoquez seraient aujourd'hui au coeur du débat et cela n'aurait certainement pas facilité l'adoption du dispositif par les Français. Vous me demanderiez pourquoi nous sommes passés par une solution américaine pour stocker les données de santé des Français et vous auriez raison, puisque nous avons démontré que nous pouvions développer une application par nous-mêmes.

Pour comprendre le choix du HDH, il faut se replacer dans le dilemme de l'époque. En 2018, le Président de la République annonce une accélération en matière d'utilisation de l'intelligence artificielle pour faire progresser la recherche française en matière de santé et de données numériques dans ce domaine. Il est alors décidé de lancer l'entrepôt de données de santé, autrement appelé le Health Data Hub ; une consultation de dix-neuf acteurs, parmi lesquels des Français, est mise en place autour de certains éléments du cahier des charges. Notre volonté est alors de démarrer très vite, pour deux raisons : nous voulons profiter de la dynamique enclenchée autour de ce sujet et la compétition mondiale en matière d'utilisation de l'intelligence artificielle dans la santé est extrêmement forte. Or le seul acteur capable de répondre aux prérequis au moment de cette consultation est Microsoft. Je vous rappelle un chiffre qui doit toujours nous faire réfléchir et qui découle de politiques industrielles très anciennes : chaque année, Amazon investit 22 milliards de dollars dans la recherche et le développement ; chaque année, la somme dépensée par l'ensemble de la France, public et privé mêlés, dans tous les domaines de recherche confondus, est comprise entre 60 et 70 milliards d'euros. Dans le cloud, en particulier, elle atteint sans doute moins de 1 milliard d'euros. Dans certains domaines, notamment l'intelligence artificielle, les Américains disposent donc d'une avance que nous ne pouvons pas nier. Cela ne signifie pas que nous ne sommes pas forts dans certains domaines relatifs au cloud ou que nous ne devons pas nous donner pour objectif de faire émerger un acteur français.

À l'issue de la consultation réalisée à l'époque, qui comprenait plusieurs Français, et pas seulement OVH, Microsoft était le mieux-disant, et le choix du ministère de la santé a été de partir avec cette entreprise pour obtenir très vite des applications. D'ailleurs, pendant la crise du covid, le HDH a été très utile pour travailler sur les interactions médicamenteuses ou sur les facteurs de comorbidités. Aurions-nous été prêts si nous avions dû attendre un an ou deux et choisir un fournisseur français ? Honnêtement, c'est très questionnable. D'une certaine manière, il s'agit d'un choix ontologique. Il a donc été décidé de partir, pour le début, avec cette plateforme et toutes les garanties ont été prises dans le cadre juridique de l'époque.

J'ai dit, lors de la conférence de presse, mon souhait que nous puissions relancer un appel d'offres, car il était très clair que la décision qui avait été prise concernait une phase de démarrage, afin d'organiser une compétition ouverte.

Je vais aller un peu plus loin : la décision prise par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) d'invalider le Privacy Shield il y a quelques semaines, qui est un coup de tonnerre dans le domaine de la gestion des données sensibles, nous a conduits à travailler, avec Olivier Véran, au transfert du HDH vers des plateformes françaises ou, au moins, européennes, parce que le contexte juridique a complètement changé. Une exigence s'impose donc à nous, comme aux parlementaires, d'ailleurs, parce qu'une infrastructure de cloud au niveau de compétitivité de celles des Américains ou des Chinois représente un investissement très coûteux. Nous devons donc tirer la conséquence de nos choix souverains. Des discussions sont en cours avec nos partenaires allemands sur ce sujet, entre le Président de la République et la Chancelière, mais il faut être conscient que nous n'avons pas, aujourd'hui, la même capacité technologique pour traiter des données de santé. Toutefois, compte tenu de l'invalidation de l'arrêt Schrems II et du Privacy Shield par la CJUE, nous travaillons à transférer ces données vers des fournisseurs de cloud européens.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion