Intervention de Cédric O

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 8 octobre 2020 à 14h30
Audition de m. cédric o secrétaire d'état chargé de la transition numérique et des communications électroniques

Cédric O, secrétaire d'État :

Je ne constate pas de corrélation entre les taux de téléchargement en Europe et la confiance dans les gouvernements. Le sujet de la confiance dans la démocratie et dans les corps intermédiaires, qu'ils soient politiques, institutionnels ou médiatiques, est un énorme sujet. La crise que nous traversons peut avoir des répercussions démocratiques eu égard à ces questions de confiance et aux tensions majeures qu'elle instille dans la société. Cette question est au coeur des relations entre gouvernants et administrés, dans le cadre d'une épidémie qui va durer. S'agissant de StopCovid et des applications similaires, je ne vois pas de corrélation entre confiance dans les gouvernements et adhésion aux applications.

Comment relancer StopCovid et lui donner une deuxième chance ? Nous ne sommes malheureusement pas à une semaine près, compte tenu de la durée prévisible de l'épidémie. Nous y travaillons. Nous réfléchissons. Nous étudions notamment l'application anglaise dont les fonctionnalités diffèrent des applications allemande et française, avec plus d'informations et une interconnexion plus forte avec le système des bars et des restaurants. Nous cherchons à mieux comprendre ce qui se passe, en lien avec nos homologues.

Par ailleurs, si nous voulons relancer l'application, nous avons besoin de trouver des relais et des alliés. La parole des gouvernants, quels qu'ils soient, partout dans le monde, souffre actuellement d'un manque de crédibilité et de confiance. Si les professions médicales estiment que StopCovid est utile, elles doivent le dire : les épidémiologistes l'ont dit, le Conseil scientifique l'a dit, mais nous avons besoin que les médecins généralistes, les professeurs d'université nous aident s'ils pensent que c'est utile pour maîtriser l'épidémie. C'est à eux d'en faire le choix. Et si les responsables de cafés, hôtels et restaurants considèrent que StopCovid peut les aider à ne pas fermer leurs établissements, il faut aussi qu'ils nous aident à ce que les gens téléchargent ou activent StopCovid. En effet, les gens téléchargent StopCovid, mais ne savent pas que lorsque l'on ferme l'application, elle n'est plus utile.

Nous allons vivre avec ce virus pendant longtemps. Pour relancer un outil « insuffisamment bien parti », si vous me permettez cet euphémisme, nous avons besoin d'une manoeuvre collective. Mardi dernier, un journaliste italien m'a appris que, pour promouvoir l'application Immuni, qui a été téléchargée plus que l'application française, mais encore insuffisamment pour être utile, les journaux italiens s'étaient mobilisés afin d'offrir au Gouvernement une page de publicité, car ils considéraient que c'était utile. Cela n'est pas un appel de ma part, mais si nous considérons collectivement que StopCovid est utile, il faut que le mouvement soit collectif. La parole politique n'est plus toujours performative : ce n'est pas parce que le ministère de la santé fait sa part du travail en rappelant systématiquement qu'il est utile de télécharger StopCovid, qu'en bout de chaîne les jeunes, les personnes âgées, les personnes concernées qui vont dans les bars et les restaurants vont effectivement la télécharger...

Le Premier ministre a été clair. Les gens ne voient pas très bien à quoi sert StopCovid quand ils portent un masque, quand ils sont seuls dans leur bureau ou avec toujours les deux ou trois mêmes personnes. Mais StopCovid est particulièrement utile lorsque vous allez au bar, au restaurant, dans une soirée entre amis non autorisée, que vous ne portez pas de masque et que vous ne savez pas forcément à côté de qui vous êtes. Ce sont des cas de figure que le Premier ministre rencontre assez peu : c'est ce qu'il a essayé d'expliquer. Il faut bien rappeler dans quelles occasions StopCovid est utile, afin, le cas échéant, de réactiver l'application en entrant dans un restaurant. Les restaurateurs doivent nous aider à le rappeler, cela nous évitera de prendre les mesures que nous sommes obligés de prendre.

Sur la question du coût de l'application, le sujet est un peu complexe. Je ne voudrais pas vous dire de bêtises... L'État français n'a rien payé au cours de la phase de développement, du 8 avril au 2 juin 2020, ainsi que j'avais eu l'occasion de vous l'indiquer lors de mes passages devant les commissions du Sénat, ainsi qu'en séance publique. Pour le même travail, les Allemands ont déboursé 20 millions d'euros et les Anglais quelques millions de livres. À partir du 2 juin 2020, le ministère de la santé est en première ligne en tant que responsable du traitement de l'application et financeur du projet. Un accord-cadre d'assistance à maitrise d'oeuvre pour le déploiement, l'infogérance, l'exploitation, l'hébergement, le maintien en conditions opérationnelles de sécurité, le support utilisateurs, l'animation du déploiement et des usages et la maintenance évolutive a été signé entre la direction générale de la santé et l'Inria. C'est dans ce cadre contractuel que l'équipe projet fonctionne, avec un accord de consortium entre les acteurs privés engagés dans le déploiement de l'application : Outscale qui est une filiale de Dassault Systèmes, Capgemini, Lunabee, Orange et Withings qui est spécialiste des objets connectés.

Il ne m'est pas possible de vous donner un chiffre, car nous n'avons à ce jour versé que des avances, sans facturation au réel. Je ne peux donc vous donner que le montant des autorisations-plafonds prévues dans le cadre du marché ; ce sont des plafonds qui ont été pensés afin de nous conserver une marge très importante qui nous permette, par exemple, de déployer de nouvelles fonctionnalités. Nous serons donc probablement à un quart ou la moitié des plafonds que je vais vous indiquer. C'est ainsi que pour les quatre premiers mois d'exploitation, du 2 juin 2020 au 31 septembre 2020, ce plafond s'établit à 206 000 euros. Les premières factures seront émises en octobre pour ces premiers mois d'exploitation. Mais je ne voudrais pas faire d'erreur...

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