Intervention de David Martinon

Mission commune d'information sur la gouvernance mondiale de l'Internet — Réunion du 4 février 2014 à 14h30
Audition de M. Bertrand de la Chapelle directeur du projet internet et juridictions et de M. David Martinon représentant spécial pour les négociations internationales sur la société de l'information et l'économie numérique

David Martinon, représentant spécial pour les négociations internationales sur la société de l'information et l'économie numérique :

Je crois à la méthode qui consiste à partir des problèmes pour rechercher les moyens de les résoudre. Dès lors que les grands textes internationaux ont consacré l'idée d'un alignement des règles de droit en ligne sur les règles existantes, la loi des Etats souverains compte au premier chef. Pour avoir été conseiller diplomatique du ministre de l'Intérieur, je puis vous dire qu'en matière d'escroquerie, de pédopornographie, de prostitution, de trafic de stupéfiant, l'impératif est d'aller vite. Quand ces délits ont leur origine à l'étranger ou peuvent y avoir des conséquences, il faut dialoguer avec des Etats souvent fragiles, qui ne disposent pas des mêmes infrastructure de surveillance que les nôtres. Alors que les malfaiteurs disparaissent vite dans le darknet, les autorités ont besoin de figer les preuves et de les utiliser via des commissions rogatoires internationales. C'est l'éternelle histoire du gendarme et des voleurs. La Convention de Budapest, qui a créé des points de contact permanents, a apporté un progrès substantiel. Lorsque la police a besoin, pour préparer un dossier d'interpellation, de figer les preuves, elle en a les moyens. Reste que la course est permanente. Les bandits cherchent toujours à prendre une longueur d'avance. Comme après les tractions avant de la bande à Bonot, la police doit courir après des malfaiteurs qui utilisent des technologies inédites.

La France a la chance de disposer d'un réseau diplomatique et policier à l'étranger, qui a permis à la police et à la gendarmerie nationales de créer des réseaux de confiance dans nombre d'Etats. Quand les données d'une affaire constatée à Paris sont localisées au Bénin, la PJ a les moyens d'obtenir des informations. Ce qui reste fondamental, aujourd'hui comme hier, c'est la relation de confiance qui peut s'établir, au-delà des frontières, entre policiers, entre magistrats.

Le blanchiment ? Il prend des proportions formidables avec la montée en puissance des monnaies virtuelles, comme le bitcoin. Un casino de Las Vegas a même décidé de l'accepter. Imaginez ! Cela démultiplie les possibilités de blanchiment.

Nous avons l'habitude de travailler avec la DG Connect. On m'a dit que les relations n'avaient pas été très bonnes lors de la conférence de Dubaï, ce n'est pas ce que j'ai constaté. Les pays de l'Union européenne partagent les mêmes objectifs, hormis deux ou trois d'entre eux, qui entretiennent des relations... privilégiées avec les Etats-Unis. Il est exact que le SEAE tente, depuis quelques semaines, de s'intéresser au sujet et cela est légitime, car ces discussions ont un caractère éminemment stratégique. Nous n'y voyons, pour notre part, que des avantages. Ce service est en train de se rendre compte que l'agenda de la gouvernance est autre chose que celui de la cybersécurité. Cela exige, de sa part, un apprentissage.

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