Intervention de Simon Chignard

Mission commune d'information sur l'accès aux documents administratifs — Réunion du 10 avril 2014 à 9h30
Audition de M. Simon Chignard consultant auteur de l'open data comprendre l'ouverture des données

Simon Chignard, consultant, chargé de mission pour Etalab :

Le mouvement d'ouverture des données publiques est à la fois ancré dans la tradition et très neuf. En 2010, Rennes est la première ville à avoir choisi l'open data, et le portail national data.gouv.fr date de fin 2012. Une soixantaine de collectivités et de territoires sont aujourd'hui engagés dans cette démarche qui concerne tous les échelons territoriaux, de la commune jusqu'à l'Etat. Voilà donc une histoire qui a commencé il y a quatre ans.

Dès l'origine, aux Etats-Unis comme en France, le mouvement d'ouverture des données est porté par deux courants. L'un procède de l'impératif de transparence, défendu par la fondation américaine Sunlight Foundation, dont la devise reprend les mots de Louis Brandeis : « La lumière du soleil est le meilleur des désinfectants », et par le collectif français Regards citoyens que vous avez auditionné ; pour eux, dans la suite de la loi de 1978, l'open data est un autre moyen de porter une ambition de transparence. L'autre courant est centré sur la réutilisation des données publiques comme un élément de transformation économique. Les données attendues ne sont pas les mêmes. Les plus utilisées relèvent du domaine de la mobilité, par exemple les horaires des transports publics. Ceux qui les réclament ne sont pas forcément coutumiers des lois d'accès aux documents administratifs. L'ambition démocratique, le retour aux citoyens, l'utilisation des données comme matière première balisent le champ de l'open data de manière parfois contradictoires. Les attentes des différents publics sont multiples et diverses, ce qui rend difficile une évaluation générale de la pertinence des choix en matière d'ouverture des données. La perspective est morale, si l'on envisage l'ouverture des données comme l'occasion de défendre des valeurs ; elle est utilitaire, lorsque les données sont considérées comme une valeur économique.

L'ouverture des données publiques n'a pas seulement pour enjeu le droit d'accès, mais aussi le droit de réutilisation. La régulation s'élabore de manière parallèle au mouvement d'ouverture comme si les deux champs étaient séparés. Ainsi, peu d'acteurs publics qui publient des données sur leur portail fournissent le répertoire de leurs informations publiques, pourtant obligatoire. La majorité des avis de la Cada ne porte pas sur des informations entrant dans le champ de l'ouverture des données publiques : pour des raisons évidentes de protection des données personnelles, l'accès à un dossier médical n'en relève pas ; il en est de même pour un dossier d'avancement d'agent public, ou la notation des répondants à un appel d'offres public.

Les données en ligne ne sont pas exhaustives. D'une part, l'open data n'est pas encore le mode de fonctionnement par défaut ; il reste l'exception, soit que les enjeux ne soient pas bien compris, soit que la volonté manque. D'autre part, les données publiques ne sont pas gérées comme un actif par les acteurs publics qui ne se posent pas la question de leur gouvernance. Leurs documents sont généralement efficacement gérés, mais elles ne procèdent pas de même pour leurs données. C'est un fantasme de croire qu'il y a dans chaque administration, dans chaque service de collectivité ou encore au sein de chaque cabinet ministériel, des données de qualité, à jour et facilement exploitables sur l'ensemble des sujets. Cela reste exceptionnel, limité à des domaines comme les données environnementales ou géographiques.

L'acteur public choisit les données qu'il ouvre. C'est donc moins la pertinence des données que la pertinence du choix qu'il faut évaluer. Est-il pertinent par exemple, comme cela s'est fait dans une ville, d'ouvrir des données sur les massifs de magnolia ? Sans doute.

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