Intervention de Martin Fourcade

Commission d'enquête sur la lutte contre le dopage — Réunion du 16 avril 2013 : 1ère réunion
Audition de M. Martin Fourcade biathlète médaillé olympique

Martin Fourcade, biathlète, médaillé olympique :

C'est un honneur d'être auditionné par votre commission. En tant que sportif de haut niveau, son objet me tient à coeur. J'appartiens à une génération qui a déchanté depuis quinze ans quand des scandales ont éclaboussé les sportifs qui l'avaient fait rêver. Cela m'a appris à me méfier, d'autant plus que mon sport, comme tous les sports d'endurance, n'a pas été épargné par le dopage : Johann Mühlegg aux Jeux olympiques de Salt Lake City en 2002, les équipes autrichienne et russe, renvoyées respectivement des Jeux de 2006 et des championnats du monde de 2009, sans parler des cas isolés recensés en 2010 et 2011. Le dopage existe, il est même devenu le plus coriace de mes adversaires.

Bien qu'il fasse l'actualité presque quotidiennement, je n'ai jamais été confronté personnellement au dopage, ni de près ni de loin. Je n'ai été témoin d'aucune allusion au dopage dans mon entourage. Je suis une preuve parmi tant d'autres que l'on peut être champion du monde et médaillé olympique sans tricher. Je ne saurai jamais comment je peux m'imposer à l'eau claire face à des concurrents qui utilisent des substances interdites : le sport de compétition est tout sauf logique, et ce qui me permet de me dépasser dans certains moments clés n'a rien de rationnel.

Avec plus de vingt contrôles urinaires ou sanguins ces quatre derniers mois, je crois pouvoir me vanter d'être l'un des athlètes les plus contrôlés de France en 2013. Cela ne suffit toutefois pas à prouver que le travail et le talent expliquent seuls mes performances. En effet, le cas de Lance Armstrong témoigne des doutes que l'on peut avoir sur l'efficacité des contrôles antidopage. Ceux-ci restent toutefois les meilleurs moyens de crédibiliser les performances, de continuer à faire rêver le public et à rendre le sportif fier de ce qu'il accomplit. Lorsque je remplis les formulaires antidopage, je me déclare toujours favorable à l'utilisation de mes échantillons, et trouve même effarant que cela ne soit qu'une option. Je suis également favorable à la géolocalisation au moyen du logiciel ADAMS : bien que peu fonctionnel, celui-ci permet de réaliser des contrôles inopinés plus ciblés.

D'autres pistes mériteraient d'être exploitées : la sanction financière et pénale des tricheurs, l'harmonisation des sanctions entre les disciplines et entre les pays, l'interdiction à ceux qui ont été impliqués dans des affaires de dopage de poursuivre une carrière dans le milieu sportif, et enfin la traque aux vices de procédure, afin de ne pas donner une seconde chance à ceux qui ne la méritent pas.

Les doutes émis sur mes performances, mes résultats, ou mon honnêteté me meurtrissent. Il est indispensable de dissuader les tricheurs avec de réelles sanctions, et de réaffirmer que ce n'est pas parce qu'un tricheur se fait prendre que nous sommes tous pourris.

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