Bonjour. Merci pour ce travail. Certaines affaires attendent depuis quinze ans, et nous avons du mal à rester motivés. Il est donc plaisant de pouvoir continuer à travailler sur ce sujet avec vous.
Je ne reviendrai pas sur mon expérience de sportif. Je souhaite aborder le problème d'une manière différente. J'ai reçu une convocation pour les enjeux sociétaux des pratiques dopantes, et je me retrouve finalement à devoir parler des enjeux sociétaux du dopage. La distinction est peut-être volontaire ; nous pourrons y revenir.
Les enjeux sociétaux du dopage sont ceux du sport en général. Nous nous retrouvons dans une situation où nous souhaitons de la performance, et en contrepartie, nous voulons lutter contre le dopage. Or, l'un et l'autre ne vont pas ensemble. Il va donc peut-être falloir faire un choix.
Il faudra éventuellement élargir la réflexion dans la perspective de la loi-cadre sur le sport.
Pour moi, le dopage constitue une solution à plusieurs problèmes, à différents niveaux, notamment celui de l'individu (problème d'argent, de reconnaissance ou encore de bien-être). Il ne faut pas oublier l'aspect mental et sociétal. Souvent, le dopage offre à un sportif un bien-être social, et ensuite seulement un bien-être mental.
Cela enlève-t-il pour autant le bien-être physique ? Nous devons nous poser la question.
De nouveaux produits arrivent, dont il est dit qu'ils sont très dangereux.
Pourquoi lutter contre le dopage ? Le dopage a un aspect politico-économique : nous voulons un pays au niveau des autres sur le plan sportif. Les fédérations doivent également exister. Or, elles sont aussi valorisées par les résultats internationaux.
Je pense que nous luttons contre le dopage par souci d'éthique, de respect et de dignité de la personne. Le fait d'être capable de se regarder dans un miroir est la première des choses. Si je persiste à me battre, c'est parce que je souhaite que les jeunes continuent à se regarder dans le miroir, et qu'ils soient fiers de le faire.
Il est possible de se regarder dans le miroir même si l'on a fait des erreurs. Il s'agit surtout de les assumer. Lorsque des tricheurs reviennent après deux ans de suspension avec un grand sourire, cela pose problème.
Si une personne qui a triché n'est pas affectée par son geste, c'est que quelque chose a failli dans son éducation quinze ou vingt ans auparavant. En effet, dès lors qu'un enfant entre dans le milieu sportif, il est poussé vers une performance globale, que j'intitule « la réussite ». Nous nous trouvons alors dans un système de compétition qu'il faut revoir.