Je représente les professeurs d'éducation physique. Il me semble qu'en tant qu'enseignants, nous sommes confrontés à une question redoutable, entre l'injonction morale, la façon dont nous percevons le dopage, et ce qu'il convient de faire. Si le dopage est la confrontation aux limites de l'homme, avec deux heures d'éducation physique au lycée, les adolescents sont loin de leur limite.
Le dopage est d'abord pour moi un problème social, qui ne se définit pas par la physiologie ou la médecine. Dans le programme d'éducation physique, la mission impartie aux professeurs d'éducation suivante est la suivante : « former un citoyen cultivé, lucide, autonome, physiquement et socialement éduqué. »
Le milieu de l'éducation physique peut être individuellement très sportif, mais du point de vue de sa fonction, il prend beaucoup de distance avec le sport. Il développe même une approche très critique du sport.
La compétition se retrouve beaucoup dans le sport scolaire. La lutte contre le dopage y est microscopique puisqu'on y recense douze contrôles. Sur la période 2007-2011, il est fait état d'aucun contrôle positif. C'est lors de la compétition scolaire de l'Union nationale du sport scolaire (UNSS), avec des phases nationales et internationales, que les jeunes sont réellement confrontés à des niveaux plus élevés de compétition.
Dans les lycées, un enseignement d'exploration est proposé, pour une minorité de trois mille élèves, avec cinq heures par semaine en plus de l'éducation physique. Il existe également une option facultative, qui comprend des thèmes d'étude dans lesquels le dopage est abordé. Nous avons aussi des sections sportives dans les collèges, pour quarante-quatre mille élèves. Le thème du dopage doit y être abordé au détour de débats plus généraux.
S'agissant de l'éducation physique, il serait peut-être heureux d'augmenter le volume horaire. Je pense par ailleurs que la question du dopage ne doit surtout pas être médicalisée. C'est le système qui crée le dopage.
J'estime également qu'il ne faut pas trop moraliser. Nous vivons en effet à une époque où la morale n'est faite que pour les pauvres. Nous nous montrons très attentifs à ne pas surcharger les responsabilités des enseignants.
Par ailleurs, l'éducation fait actuellement l'objet d'énormes pressions pour sa transformation. J'ignore ce que sera l'enseignement moral et civique annoncé par le ministre.
Je crois que nous en venons aux questions de morale lorsque la société ne sait plus se réguler ; il faut certainement et mettre en place des bornes clairement établies et développer une surveillance intraitable et impartiale, ne tolérant aucune dérogation à tout dépassement. La crise morale est une crise sociale. C'est un peu ainsi que les collègues le vivent lorsqu'ils sont confrontés à ces questions. Je vous remercie.