La France produit 15 millions de tonnes d'acier - un peu plus en 2018, qui fut une très bonne année. Environ 60 %, soit 11 millions de tonnes, sont des produits plats, dont nous sommes exportateurs nets. Les 4 millions de tonnes restantes sont des produits longs, auxquels s'ajoutent 4 millions de tonnes supplémentaires que nous importons.
Les usines ne meurent pas de vieillesse. Elles meurent faute de client, et à condition qu'on les modernise. Il faut y veiller à Dunkerque et à Fos-sur-Mer - où 115 millions d'euros ont été récemment investis, mais où des portes ne sont plus étanches et laissent filtrer du benzène... Il serait indispensable de les remplacer pour régler ce problème.
Cette modernisation est nécessaire surtout pour les deux grandes usines de produits plats, car c'est là où les investissements sont les plus lourds. En Italie, l'usine de Tarente s'est laissé dépasser et cela coûterait une fortune de la remettre à niveau.
L'hydrogène est une excellente solution, mais à moyen terme. Les Suédois ont créé un consortium entre la mine de fer de Kiruna, le sidérurgiste SSAB et l'électricien Vattenfall pour mettre en place des démonstrateurs à hydrogène. Mais produire de l'hydrogène coûte cher, surtout de l'hydrogène vert. Avant de fabriquer de l'acier avec de l'hydrogène, mieux vaut l'utiliser pour les voitures. D'ailleurs, la Suède n'envisage pas l'équilibre carbone de sa sidérurgie avant 2050.
En revanche, ce pays a recours à la technologie hybrit, qui a pour objectif de remplacer le charbon à coke traditionnellement utilisé dans la fabrication de l'acier à partir de minerai de fer par de l'hydrogène. Comme les Suédois, nous devrions faire travailler ensemble les électriciens, les sidérurgistes et les mineurs.
La Chine exporte surtout en Asie du Sud-Est, en Afrique et en Amérique latine, c'est-à-dire partout où le besoin d'acier se fait sentir et où les industries ne sont pas protégées. Les produits chinois ne nous ont donc pas envahis mais se sont substitués à une partie des exportations européennes qui a perdu les marchés des pays en voie de développement. Les prix mondiaux - et donc européens - ont en outre baissé. Les exportations chinoises n'ont pas eu un impact significatif sur les volumes mais sur les prix, d'où les difficultés du secteur.
L'Europe a taxé les importations d'acier électrique chinois : la conséquence en a été que les fabricants de transformateurs et de moteurs européens n'ont plus pu vendre en Chine ni ailleurs. Nous avons donc sauvé quelques centaines d'emplois en empêchant la Chine de nous vendre des produits que nous ne fabriquions plus en quantité suffisante et nous avons perdu plus de 10 000 emplois en Hollande et en Allemagne. N'oublions pas que si la sidérurgie n'emploie pas beaucoup de salariés, ses clients en emploient bien davantage.
La séquestration du CO2 a de l'avenir : divers projets dans la mer du Nord à hauteur de la Hollande permettraient d'en capter une partie importante. Des projets de méthanisation sont également en cours, dont trop peu à Dunkerque. Ce sont des projets réalistes à moyen terme, c'est à dire avant que la solution à l'hydrogène ne s'impose.