Intervention de Jean-Marc Lazard

Mission commune d'information sur l'accès aux documents administratifs — Réunion du 13 février 2014 : 1ère réunion
Audition de M. Jean-Marc Lazard président directeur général d'opendatasoft

Jean-Marc Lazard, président directeur général d'OpenDataSoft :

J'ai fondé OpenDataSoft il y a deux ans. Nous concevons des logiciels pour les producteurs de données et pour leurs utilisateurs. Nous mettons à leur disposition une plateforme sur le cloud, comportant nos solutions de traitement, ce qui présente des avantages en termes de rapidité de disponibilité et de coûts.

Nous offrons la possibilité sur ce portail de se connecter aux données de toutes natures qui existent déjà. Parmi nos clients figurent des collectivités locales (comme le conseil général du Pas-de-Calais, la région Ile-de-France, la ville de Paris) et des entreprises publiques (comme EDF ou la RATP) ou privées, des producteurs de données ou des utilisateurs.

Le modèle économique repose sur la réalité de l'usage des données : l'investissement de départ est faible, nous nous contentons de libérer les données. Les producteurs de données se servent de notre plateforme pour mettre en oeuvre leur démarche d'open data. Parfois, les filtres développés sont le support de nouveaux services, de nouvelles applications. Leurs utilisateurs finaux y trouvent des données qui les concernent et d'autres avec lesquelles elles peuvent les croiser. Les premiers utilisateurs sont les collectivités publiques : nos solutions facilitent la circulation interne de l'information, ce qui améliore le service au public et leur permet d'alimenter des portails comportant notamment de la visualisation. Il est préférable que ces données soient fournies dans leur état initial, ce qui permet de recueillir les commentaires des utilisateurs. Les entreprises quant à elles peuvent croiser leurs propres données et des données publiques pour offrir de nouveaux services, comme par exemple Veolia pour la qualité de l'eau.

L'open data fait partie de tout un écosystème. Que deviennent les innovations qu'il génère ? Un matériau est mis à disposition. Des entrepreneurs l'exploitent. Mais leur projet n'est pas toujours durable, car il n'aboutit pas forcément à un modèle économique viable. Pour cela, il faudrait que la puissance publique achète ce type de services. Sans cela, seuls les plus gros acteurs surnageront. Notre modèle est donc différent de celui qui existe dans les pays anglo-saxons. Qu'attendent nos clients ? Un département, comme les Alpes de Haute-Provence, par exemple, souhaitera développer l'attractivité touristique de son territoire.

L'open data est un élément de rupture. On passe d'une culture fondée sur la comptabilisation des visiteurs du site web du département à une refondation de l'activité pour mieux collecter les données auprès des différents acteurs (gites, ...), les faire remonter plus rapidement, mieux les rendre accessibles et développer l'attractivité du territoire auprès du public. Le retour sur investissement est acquis en six mois. Le coût de promotion et de gestion des données est divisé par quatre, ce qui permet de redéployer les ressources. L'un des principaux enjeux de l'open data est de rendre plus efficace l'action publique et de réduire les dépenses, en laissant le soin aux acteurs qui recueillent les données de dégager des ressources qui peuvent vous être utiles.

Les utilisateurs de données utilisent nos solutions pour collecter des données, parfois disponibles dans des formats techniques peu accessibles - comme celles qui concernent les sous-sols - afin de développer de nouveaux usages. En effet, de nombreux organismes produisent des données, mais dans des conditions techniques qui en restreignent le potentiel. D'où notre rôle de pivot.

La réglementation évolue, mais reste à clarifier. Etalab a joué un rôle important dans la libération des données. Des cadres réglementaires devraient encore évoluer. Les perspectives sur les coûts de l'accès à l'open data sont prometteuses, ces coûts n'étant d'ailleurs pas un frein lorsqu'ils sont peu élevés. En revanche, il serait bon que le cadre juridique évolue, afin de favoriser l'achat de services auprès de petites sociétés prestataires françaises lors des marchés publics.

Le coût d'entrée est faible et les technologies requises sont simples. Des démarches volontaristes sont en cours. Il reste néanmoins encore beaucoup à faire pour libérer les données et les rendre interopérables. Une préférence donnée aux start-ups serait décisive, pour éviter de réinventer la roue à chaque fois, comme cela se fait actuellement dans une vingtaine d'endroits en France. Cela serait favorable à l'emploi et au développement économique.

Aux Etats-Unis, une agence est chargée d'évaluer les dépenses et investissements de recherche et développement, ainsi que leurs effets concrets sur l'économie, grâce à l'open data et à un effort de normalisation en amont des données. En France, - chaque acteur, le CNRS, l'Inria ... -, publie ses propres données.

En France, ces données sont techniquement illisibles, chaque organisme publiant ses données sous des formats spécifiques, avec des granularités différentes, ce qui ne le rend pas interopérable. Le législateur serait fondé à fixer précisément les modalités d'établissement et de diffusion des données fournies par les organismes publics, ce qui permettrait, par exemple, de tracer toutes les dépenses publiques. En Grande-Bretagne, toutes les grandes villes font établir un tableau de bord d'efficacité, établi à partir des données existantes, permettant une auto-évaluation. A cet égard, l'Europe continentale et le monde anglo-saxon ne fonctionnent pas de la même manière.

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