Pourquoi Arras est-elle engagée dans cette réforme ? L'analyse des besoins sociaux de la ville a livré des chiffres alarmants qui nous ont incités à mettre en place la réforme des rythmes scolaires dès 2013. Services et élus y ont travaillé. L'éducation est une priorité majeure dans un contexte de renforcement des inégalités et de crise sociale. Nos objectifs-clefs sont l'accès au savoir et le développement de compétences favorisant l'emploi. La réforme constitue un projet ambitieux qui va de pair avec un projet éducatif territorial inscrit dans la durée. L'éducation doit être un vecteur du développement territorial d'Arras. Cela exige du temps et de la pugnacité. Le projet a le soutien total du maire d'Arras, Frédéric Leturque.
La réforme vise à rétablir une égalité pour tous les enfants. Arras compte 3 300 élèves inscrits dans le public, 26 écoles maternelles et élémentaires, 2 écoles primaires et 6 écoles privées comptant 1 500 élèves, mais qui ne sont pas assujetties à la réforme. Le constat est une baisse générale du niveau. 60 élèves sont en situation de décrochage chaque année - ce qui est énorme. 22 % des élèves ne maîtrisent pas les savoirs de base à leur entrée au collège. Arras donne l'image d'une très belle ville mais, autant au centre-ville qu'à la périphérie, et sans qu'aucun milieu ne soit épargné, elle compte des enfants en détresse d'apprentissage.
L'objectif de la réforme est que les enfants scolarisés arrivent au CM2 en maîtrisant les savoirs de base. Nous avons opté pour le mercredi matin et sa mise en place s'est effectuée à la rentrée 2013 selon deux scénarios : en maternelle, les temps d'activité péri-éducatifs (TAP) interviennent de 13 h 15 à 14 h ; dans les classes élémentaires, ils ont lieu de 15 h 15 à 16 h. Ce choix s'est fait à l'issue d'une grande concertation impliquant l'Éducation nationale, les parents, les enseignants et les associations. En maternelle, le temps de sieste devait être privilégié pour les plus petits, les moyens et les grands bénéficiant d'un temps ludique d'éveil avant de reprendre les cours. À l'école élémentaire, la fin de journée est apparue comme le meilleur moment pour mettre en place les TAP, et cela de manière consensuelle. L'adaptation de l'emploi du temps des maternelles a été plus difficile : faute d'adhésion des enseignants, nous avons mené plus de 300 heures de concertation ; l'inspection académique nous a accompagnés.
Au final, nous avons trouvé le bon tempo. Les parents sont mobilisés autour de ces choix et le conseil municipal y est favorable. Grâce à une volonté forte, la rentrée scolaire s'est faite dans de bonnes conditions. La première semaine de septembre a néanmoins été un peu compliquée, la fréquentation des ateliers (langues, sport, culture et sciences), estimée initialement à 50 %, atteignant en réalité 70 %.
S'il a fallu redistribuer les cartes, le résultat est là : les ateliers fonctionnent et les enfants sont ravis. La mise en oeuvre de la réforme s'est faite dans leur intérêt. Elle a donné lieu à des partenariats, comme avec l'Université d'Artois, pour offrir un éveil à la langue chinoise assuré par les étudiants de l'Institut Confucius, ou avec le Château de Versailles. La cité scientifique d'Arras s'est également impliquée. L'éventail de l'offre proposée est riche et tire parti du potentiel de la ville. L'aménagement d'un temps périscolaire est une ouverture pour les enfants.
Le succès de la réforme résulte des ajustements mis en place pour répondre à l'inquiétude des enseignants et des parents. Des compromis ont été trouvés pour ne pas envahir la classe, qui est l'espace des enseignants. Une communication efficace a apaisé les craintes des parents face à la multiplication des intervenants et aux questions de sécurité. Il a fallu être réactif et établir un nouvel organigramme du service éducatif de la ville. Si des ajustements restent nécessaires, les choses se passent bien, peut-être parce que notre ville moyenne dispose de richesses sur son territoire.