Intervention de Pascal Saint-Amans

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 13 mars 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Pascal Saint-amans directeur du centre de politique et d'administration fiscales de l'organisation de coopération et de développement économique ocde

Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d'administration fiscales de l'OCDE :

Je ne suis pas encore allé à Jersey, mais quand on y va, on constate que 30 000 ou 40 000 personnes sont employées dans le secteur financier.

Ce critère relatif à l'activité économique réelle est donc plus faible.

Au niveau international, il n'existe pas de définition du paradis fiscal, en dehors de celle de l'OCDE de 1998, et je ne suis pas sûr que l'on soit en mesure, demain, d'en inventer une nouvelle, d'autant que, dans la communauté internationale, une définition doit faire l'objet d'un consensus entre tous les gouvernements.

Il semble plus intéressant de regarder ce que chaque pays considère comme lui étant dommageable.

Pour la France, est-ce un écart de fiscalité ? Le jugement peut être objectif et pas forcément politique, péjoratif ou négatif, comme celui qui consiste à accuser tel pays d'être un paradis fiscal, notion qui a une connotation négative.

Vous pouvez considérer qu'une fiscalité de cinq, dix ou vingt points inférieure à la vôtre - mais encore faut-il parler de fiscalité réelle, du taux effectif d'imposition - est une juridiction à fiscalité privilégiée.

Deux aspects sont alors à prendre en compte : la différence de taux et la transparence. À ce stade, les travaux qui ont été menés portent sur l'absence de transparence. Vous considérez donc comme paradis fiscal une juridiction non coopérative, c'est-à-dire qui refuse d'échanger des renseignements avec vous et qui, par ailleurs, offre zéro fiscalité.

Mais cela ne vous empêche pas d'appliquer l'article 209 B, même si l'on vous a donné des informations, dès lors qu'il existe un écart de fiscalité trop important. Voilà pourquoi c'est à chaque État de voir ce qu'il en est.

Cela m'amène à votre dernière question : qu'en est-il des politiques à l'égard des entreprises publiques vis-à-vis des paradis fiscaux ? Il n'existe pas de définition, hormis celle de l'OCDE qui est vieille et plus tellement opérationnelle. Par conséquent, s'engager sur ce point ne permettrait pas d'aller très loin. Néanmoins des questions nous sont parfois posées sur ce sujet.

Voilà peu, j'ai eu l'administration danoise au téléphone. Leur entreprise de coopération - c'est plutôt une agence - qui s'occupe des investissements dans les pays en voie de développement monte des schémas via l'île Maurice.

L'île Maurice a signé avec l'Inde un traité qui lui permet d'investir dans ce pays en ne payant pas d'impôt en Inde, en en payant très peu à l'île Maurice et aucun dans l'État de résidence. C'est légal puisque cela résulte d'un traité.

Les Indiens s'en plaignent systématiquement, mais ils n'ont jamais dénoncé le traité avec l'île Maurice. Il suffirait pourtant qu'ils le fassent pour que le schéma prenne fin. Mais c'est peut-être aussi un moyen qu'ont les Indiens de subventionner l'île Maurice, qui a un territoire assez largement peuplé de personnes d'origine indienne !

Le Danemark se dit attaqué, car l'investissement a lieu dans un pays qui est considéré comme étant un paradis fiscal et qui a fait l'objet d'un examen combiné (phase 1 et phase 2) par les pairs, examen qui n'était pas extraordinaire ! Voilà le type de problématiques qui se posent.

Vous trouverez aussi dans les journaux belges de ces derniers jours des remarques sur une entreprise similaire qui investit via des juridictions considérées comme étant des paradis fiscaux ou du moins associées à des paradis fiscaux dans l'esprit public.

Cette vision est assez répandue dans de nombreux pays, mais je ne peux pas vous donner un éclairage précis, car nous ne travaillons pas de façon systématique sur ce point.

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