La Cour des comptes a montré que l'avantage économique en matière d'emploi représenté par un grand stade, relevait de la croyance. Nous n'avons que peu d'études, mais si l'on recoupe les palmarès économiques publiés par des magazines tels que L'Express ou Challenges et le niveau des clubs sportifs, il n'y a aucune corrélation évidente entre la présence en ligue 1 et le classement économique d'une ville : sur 35 clubs présents en ligue 1 hors Paris, 20 seulement figurent dans les 50 premières villes des classements économiques. Une région comme la Corse s'offre fréquemment deux clubs en ligue 1 sans être un modèle de développement économique. L'effondrement de l'économie de Saint-Etienne coïncide avec la grande période de son club de football.
Le contenu en emplois du chiffre d'affaires du football est faible : environ deux emplois pour un million de chiffre d'affaires, contre sept ou huit pour le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP). Quand un ménage préfère le football au cinéma ou au restaurant, d'une certaine manière, il détruit des emplois.
La croissance de la taille des stades dégage-t-elle de plus grandes recettes de billetterie, susceptibles de financer ceux-ci ? Le vecteur de recette principal des clubs sont les droits de retransmission télé, apparus en 2000 et 2004, qui s'élèvent à 700 millions et constituent 50 % du budget de beaucoup de clubs. La billetterie en représente 10 à 20 %. Même en l'augmentant, on ne peut espérer qu'elle finance des équipements de 300 millions ou 400 millions.
De plus, remplir un stade plus grand suppose d'offrir un plus beau spectacle et, pour cela, d'aligner des joueurs qui attirent du public par leurs résultats, ce qui a un coût. On le voit bien, en vendant de plus en plus de joueurs, l'Olympique Lyonnais n'est plus le champion qu'il a été.
L'intervention des collectivités territoriales se heurte à la règlementation, voire aux interdictions édictées par la Commission européenne : les aides pour l'Euro 2016, dont le montant est loin d'être négligeable, n'ont toujours pas été validées. Le plus privé des stades français n'est jamais entièrement privé : il bénéficie de la garantie d'emprunt du conseil général, du soutien de la Caisse des dépôts et consignations, sans parler des équipements périphériques. La légitimité des aides publiques est ici directement mise en cause, car les lois Buffet ont été validées par l'Europe. Le rapport Besson rappelle la corrélation directe entre le poids financier des clubs et la réussite en champions league : aider les clubs les fait rentrer directement dans le champ de la concurrence européenne.
Pourquoi la grande agglomération lyonnaise n'aurait-elle pas un grand stade ? Les 70 à 100 millions de recettes supplémentaires par an ne viendront sûrement pas de la billetterie. Elles sont liées à un ensemble d'opérations sur 50 hectares, dont la cession s'est faite, selon nous - le débat juridique n'est pas clos - à une valeur en dessous du marché, et à des plus-values sur les parcelles revendues. Les clubs de ce niveau ne peuvent réaliser plus de 50 millions de recettes de billetterie par an. Ces clubs sont très riches, mais leur argent, au lieu de mettre de l'huile dans les rouages, met de l'huile sur le feu et entraîne un emballement du prix des joueurs. Par conséquent, nous recommandons un plafond global limitant le nombre de joueurs et la masse salariale par club.