Intervention de Ghislain Zuccolo

Mission commune d'information sur la filière viande en France et en Europe — Réunion du 16 mai 2013 : 1ère réunion
Audition de Mme Nicole Sugier présidente de la société nationale de défense des animaux snda et de M. Ghislain Zuccolo directeur de la protection mondiale des animaux de ferme pmaf

Ghislain Zuccolo :

Fondée en 1994 et reconnue d'utilité publique, notre association pour la protection mondiale des animaux de ferme (PMAF) remplit plusieurs missions. Nous conseillons d'abord tous ceux qui sont chargés de mettre en oeuvre la réglementation qui protège les animaux d'élevage. Nous surveillons particulièrement l'application des normes pour le transport des animaux et avons publié un guide pratique sur ce sujet ; en complément, nous intervenons régulièrement à l'école de formation des gendarmes située à Fontainebleau. Nous travaillons ensuite avec l'industrie agro-alimentaire, la grande distribution et les éleveurs pour accompagner les initiatives favorisant le bien être animal (BEA). L'association gère également un département éducation, qui intervient de l'école primaire à l'enseignement supérieur agricole, ainsi qu'une ferme d'animation de 44 hectares dans la Meuse qui recueille en priorité des animaux d'élevage au passé difficile.

Sur le fond, nous pensons, en premier lieu, que le BEA est perçu, à tort, comme antagoniste avec les impératifs de rentabilité économique, les éleveurs y voyant trop souvent une source de surcoûts et de distorsion de concurrence. Plus généralement, en France, le BEA ne fait pas suffisamment partie de notre culture, à la différence des pays du nord de l'Europe. Notre association estime au contraire que le BEA est un atout pour inciter les consommateurs et les importateurs à choisir des produits français.

Historiquement, c'est le modèle de la petite exploitation de polyculture-élevage qui a dominé dans notre pays jusqu'en 1945. Puis il a quasiment disparu par la suite avec la volonté d'intensifier la production, ce qui a eu des conséquences néfastes pour le BEA. Fort heureusement, à partir des années 1960, les labels se sont développés avec le succès particulièrement notable des poulets de chair élevés en plein air. Cette politique de labellisation a eu de nombreux effets bénéfiques et nous apparait comme un véritable rempart contre la délocalisation de nos élevages : on peut délocaliser la production de poulets standards mais pas des animaux élevés selon un cahier des charges impliquant une localisation géographique précise. La France a également des atouts considérables pour favoriser le BEA et les élevages de qualité avec des conditions climatiques et de vastes herbages qui facilitent l'élevage des animaux en plein air, bien plus que dans les pays du Nord. Ces derniers sont néanmoins sensibles au BEA et c'est la raison pour laquelle ils importent 4 % de la production de poulets élevés en plein air. Les producteurs français sont néanmoins de plus en plus concurrencés par les labels BEA des pays du Nord : les SPA allemande, hollandaise et britannique en ont créé et je fais observer que le label « Freedom food » correspond à des exigences moins strictes que l'élevage en plein air, avec un abattage des animaux à l'âge de 55 jours contre 81 pour nos poulets fermiers.

A mon sens, l'insuffisance de la communication sur nos savoir-faire dans le domaine du BEA nous fait perdre des parts de marché ou manquer des opportunités de développement.

Notre association n'est pas favorable à la création d'un label BEA spécifique qui s'additionnerait à l'existant et risquerait d'introduire une confusion dans l'esprit des consommateurs. Nous préférons faire évoluer les labels existants pour qu'ils intègrent les exigences de BEA et communiquent mieux sur ce point. Tel est le cas, en particulier, des labels AOP fromagers qui pourraient mettre en relief l'accès garanti des animaux aux pâturages pendant au moins six mois. Nous avions réalisé dès 1997 une étude sur les cahiers des charges du label rouge au regard du BEA qui montraient ces atouts. Au demeurant, en France, contrairement aux pays du Nord, on associe la qualité du produit au BEA et au respect de l'environnement. Il serait donc inadapté de multiplier les labels, qu'il convient simplement de perfectionner.

Nous estimons également nécessaire de développer des systèmes d'élevage innovants économiquement viables et avec une meilleure prise en compte du BEA. Par exemple, nous travaillons depuis 2008 avec le groupe Carrefour, qui de façon générale s'efforce de proposer une alternative aux aliments issus de l'élevage intensif. En ce qui concerne les lapins, nous nous sommes heurtés à une difficulté puisque seuls des animaux élevés en cage sont proposés. Carrefour vient donc de lancer un appel d'offre pour la production de lapins élevés en parc et sans antibiotiques. Pour l'instant, aucune réponse ne s'est manifestée. C'est regrettable puisque cette forme d'élevage répond à une véritable attente.

La coopérative Terrena a répondu, mais sans aller assez loin dans le respect du cahier des charges. Par ailleurs, seuls 1 à 3 % des porcs sont aujourd'hui élevés en plein air : l'idéal serait de développer cette forme d'élevage mais nous sommes bien conscients des divers obstacles qui s'y opposent. La quasi totalité des porcs sont élevés sur caillebotis et environ 5 % sur paille. Nous souhaitons promouvoir cette dernière modalité et avons lancé depuis plusieurs années diverses actions : des campagnes d'information destinées aux éleveurs et l'élaboration d'une brochure technique qui sera publiée en juin prochain. La PMAF mène également une action conjointe avec le groupement de producteurs Cooperl ainsi que le groupe Carrefour pour l'élevage de porcs non castrés, afin d'éviter des souffrances à ces animaux.

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