Les groupements hospitaliers de territoire (GHT) ont fait couler beaucoup d'encre, notamment sur leurs fonctions de support mutualisé. Il serait dommage de réduire les GHT aux seules fonctions d'achat : ce n'est pas leur coeur de métier. Si des ajustements ont été nécessaires pour répondre à nos attentes en proximité - la baguette de pain est un exemple souvent cité -, ce n'est clairement plus aujourd'hui une difficulté majeure. Nous avons trouvé des solutions par rapport aux contraintes des achats groupés.
Le GHT, ce sont surtout les filières. L'outil encore un peu neuf et jeune, mais les notions d'infirmières en pratique avancée (IPA), de consultations avancées, d'équipes mobiles de gériatrie, d'hygiène ou autres se structurent avec les GHT. Ensemble, nous apportons des réponses aux populations.
La période covid a accéléré certains de ces travaux et en a peut-être ralenti d'autres. Aujourd'hui, on le sent, les établissements veulent réinvestir dans le maillage de proximité. À cette fin, ils savent qu'il faut pouvoir déployer les consultations avancées.
Notre fédération, même si les avis ne sont pas uniformes, témoigne d'un certain optimisme. Les choses vont dans le bon sens et nous sommes également mieux représentés dans la gouvernance. Le renforcement de ce maillage nous aidera à aller encore davantage dans ce sens.
S'agissant des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), la situation varie en fonction des territoires. Il existe de nombreuses maisons de santé pluridisciplinaires ; ça a pris du temps, mais c'est en place. Historiquement, nous travaillons avec elles, cela fait partie de notre culture. En ce qui concerne les CPTS, leur structuration appelle un travail administratif. Les partenaires et les acteurs sont sollicités. Nous voyons d'un bon oeil ce déploiement fortement incité par les agences régionales de santé (ARS) et les organismes représentatifs. Néanmoins, dans certains territoires, le déploiement pourra peut-être prendre un peu plus de temps en raison des freins administratifs.
L'exercice mixte - M. Ricono pourra compléter mon propos - constitue l'un des atouts majeurs de nos établissements. Aujourd'hui, on le sait, les professionnels médicaux et paramédicaux peuvent rechercher des modes d'exercice différents et vouloir exercer en cabinet, mais aussi à l'hôpital. Il y a dix ans, nous avions beaucoup de difficultés pour attirer des médecins dans mon bassin de population. Le président de la CME a fait découvrir aux internes de l'hôpital les atouts de la proximité. Grâce à cet effort, nous disposons aujourd'hui de cinq médecins, dont quatre de quarante ans : c'est l'avenir et ils sont attirés par cet exercice mixte. C'est un réel atout et une spécificité chez nous. Ce mouvement ne s'arrête pas aux médecins, il concerne également les personnels paramédicaux : ergothérapeutes, orthophonistes, etc. Nous n'avons pas forcément besoin de postes à temps plein ; un exercice à la fois en cabinet libéral et en structure hospitalière convient mieux à une organisation territoire fine.
Quant aux financements, nos établissements pratiquent tous des soins de suite et de réadaptation (SSR), financés à 90 % par une dotation et à 10 % par la modularisation. Nous sommes donc moins concernés par la tarification à l'activité (T2A). Pour la médecine, les évolutions législatives nous donnent davantage de sécurité et privilégient une vision non plus de court terme, mais de moyen et de long termes, ce qui nous permettra de piloter plus sereinement nos projets.
La dotation de responsabilité populationnelle est une nouveauté. En quelque sorte, nous allons expérimenter la confiance donnée aux acteurs de terrain pour porter la qualité et la prévention sur le territoire, de manière coordonnée. C'est un point positif, nous espérons simplement que les financements seront à la hauteur afin d'épargner à nos structures des effets de trésorerie quelque peu délétères. Quoi qu'il en soit, j'ai confiance.
Docteur Jean-François Ricono. - L'exercice hospitalier est attractif pour les jeunes médecins, car il amène de la richesse au niveau professionnel, il favorise la diversité et il permet de travailler en équipe. La plupart d'entre eux sont issus de l'internat. Ils connaissent donc déjà bien l'hôpital, ça ne leur fait pas peur.
La difficulté reste toujours de trouver un point d'équilibre entre l'exercice de ville et l'exercice hospitalier. Mais quand l'offre hospitalière est associée à la possibilité d'avoir un exercice libéral de qualité, avec une bonne organisation, de bons locaux et une coopération interprofessionnelle valable, c'est attirant. Dans mon territoire, nous avons enregistré de nombreux départs à la retraite ces dernières années, mais nous avons aussi réussi à avoir huit installations de jeunes médecins, preuve qu'ils répondent présents si l'offre est qualitative en termes d'exercice, que ce soit sur l'hôpital ou sur la ville.
En ce qui concerne le secteur hospitalier, ce qui peut parfois constituer un frein, ce sont les contraintes administratives : traçabilité dans les logiciels, certifications, etc. Le ratio entre le temps passé auprès du patient et celui passé dans le service hospitalier est de un à trois. Malgré tout, ça fonctionne.
Vous avez posé une question sur l'articulation entre les CPTS et l'hôpital. Il existe d'abord peu de CPTS. Par ailleurs, seulement un petit nombre d'entre elles ont d'emblée intégré l'hôpital de voisinage dans leur conseil d'administration. Quoi qu'il en soit, toutes ces structures travaillent avec l'hôpital, c'est quand même l'objectif. Une CPTS doit intégrer tous les acteurs du soin sur le territoire, y compris les hôpitaux de proximité et les représentants du secteur médico-social.