Intervention de Virginie Tassin Campanella

Mission d'information Fonds marins — Réunion du 5 avril 2022 à 17h00
Audition de maître virginie tassin campanella avocat à la cour experte auprès de l'union internationale pour la conservation de la nature uicn et Mme Anne Caillaud chargée de programme outre-mer à l'uicn

Virginie Tassin Campanella, avocat à la Cour, experte auprès de l'Union internationale pour la conservation de la nature :

Les expressions que j'ai utilisées ne visaient absolument pas à exclure l'exécutif ou les gouvernements locaux. Il s'agissait uniquement de souligner l'importance de la dimension ultramarine de la France. Or, pour moi, c'est une vision plus métropolitaine et industrielle qui est développée ici.

L'association des communautés locales ou des représentants des peuples autochtones est en cours dans le cadre de la négociation de l'accord sur la biodiversité se rapportant à la convention des Nations unies sur le droit de la mer. L'idée n'est pas seulement de les tenir informés, mais aussi de les associer à la prise de décision. Nous sommes dans une phase de révolution du droit international : les gouvernements locaux, mais aussi les communautés locales et la société civile pourront participer d'une façon ou d'une autre à la prise de décision, notamment pour les aires marines protégées qui peuvent être impactées par l'exploration et l'exploitation.

En ce qui concerne les grands fonds marins et la colonne d'eau, moi non plus je ne suis pas informée de programmes d'exploration à proprement parler, en tout cas français. Pour comprendre ce qui se passe, il faudrait tout simplement se concentrer sur les ressources génétiques marines, lesquelles font l'objet des négociations actuelles sur la « biodiversité au-delà de la juridiction nationale » (BBNJ). Mais les ressources génétiques marines de la haute mer et celles de la Zone se superposent puisque la haute mer est en communication directe avec le plateau continental, lui-même partagé avec la haute mer. Bref, il y a superposition dans le même espace plutôt qu'empilement, avec des droits liés à la liberté de la haute mer, notamment en ce qui concerne les câbles et la recherche scientifique marine.

Il est tout à fait possible de créer au niveau national un conseil scientifique des fonds marins. Ce serait même approprié, notamment avec une représentation importante de l'outre-mer. Il ne doit pas s'agir uniquement d'une instance métropolitaine. En revanche, le comité juridique et technique mentionné tout à l'heure au sein de la convention des Nations unies sur le droit de la mer comprend déjà une dimension scientifique. Le problème, c'est que les États ont nommé principalement des membres juridiques et techniques, et non des scientifiques. Il y a donc une responsabilité des États de manière générale, il ne faut pas incriminer seulement l'AIFM.

La France pourrait très bien décider de nommer des biologistes et des océanographes. Elle pourrait porter ce message en demandant un rééquilibrage, conformément à ce que prévoyait initialement la Convention pour cette commission juridique et technique. En utilisant cette stratégie, nous éviterions le piège consistant à demander la création d'une instance nouvelle, car - ne nous y trompons pas - la Convention ne sera jamais amendée. Pour des questions de géopolitique, personne ne souhaite en effet la revoir de peur que certains acquis soient perdus. Il faut donc vraiment jouer avec ce qui est déjà prévu. Il pourrait s'agir d'une demande européenne, quitte à créer ensuite une sous-commission au sein de la commission juridique et technique. Quoi qu'il en soit, il importe avant tout de trouver un chemin vers des opportunités acceptables.

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