Je partirai de la question de la place du législateur et de la question de la place du politique. Nous avons une vision déformée si nous raisonnons exclusivement en termes de droits fondamentaux. La loi a d'abord pour mission de défendre l'intérêt général. Elle doit respecter les droits fondamentaux dans ce cadre. Le juge a aussi pour mission d'appliquer l'intérêt général tel qu'il a été défini par le politique et le législateur.
Si nous revenons aux cas pratiques qui ont été abordés sur l'immigration, la politique environnementale et le temps de travail des militaires, je dirai que ces questions sont éminemment politiques. Selon moi, ce n'est pas au juge constitutionnel que la décision finale doit appartenir sur ces sujets en cas de crise. Il y a des évolutions qui posent problème.
Redonner sa place au législateur, c'est lui permettre de garder la main et de prendre la décision en dernier ressort. Dominique Rousseau parlait du dialogue où le juge constitutionnel explique au politique ce qui pose problème, mais nous pourrions faire l'inverse. Le politique pourrait aussi expliquer au Conseil constitutionnel quelles jurisprudences posent problème.
En ce qui concerne l'Europe, il faut donner au politique des moyens juridiques sur lesquels s'appuyer, sinon on ne remontera pas la pente. Cela consisterait à inscrire dans la Constitution un certain nombre de principes. On ne peut pas laisser au juge européen le soin de déterminer ce qui relève de l'identité nationale et ce qui relève de l'identité européenne.
Enfin, j'ai été très intéressé par ce qu'a dit Guillaume Tusseau sur les pratiques anglo-saxonnes et le fait d'instaurer des mécanismes institutionnalisés de dialogue entre le juge constitutionnel et le législateur, en trouvant les techniques adaptées.