Intervention de Catherine Vautrin

Mission d'information Conditions de la vie étudiante — Réunion du 15 avril 2021 à 11h00
Thématiques territoriales — Audition de Mme Catherine Vautrin présidente de l'association des villes universitaires avuf et M. François Rio délégué général Mme Solange Berlier vice-présidente de la loire et M. Alexandre Grenot vice-président du département de la charente-maritime représentants de l'assemblée des départements de france adf Mm. Sébastien Ragot maire de givry saône et loire vice-président en charge de l'enseignement supérieur du grand chalon représentant de l'assemblée des communautés de france adcf paul hermelin auteur du rapport « rééquilibrer le développement de nos territoires » institut montaigne et mickaël vaillant conseiller chargé de l'enseignement supérieur régions de france

Catherine Vautrin, présidente de l'Association des villes universitaires de France :

Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, merci de me donner la parole. L'Association des villes universitaires de France regroupe 99 collectivités, dont des villes universitaires de très grande taille (à commencer par Paris) et des villes de plus petite taille.

En ce qui concerne la capacité des collectivités locales de connaître la population étudiante présente sur le territoire, nous pouvons nous appuyer sur certains outils, comme les schémas locaux d'enseignement supérieur et de recherche ou de développement universitaire. Certaines universités ont réalisé des diagnostics qui permettent d'alimenter les observatoires locaux. La loi Fioraso1(*) n'a cependant assigné aux établissements ou regroupements qu'une une simple obligation de consultation des collectivités. Il aurait été souhaitable d'aller plus loin. L'article L. 718-4 du code de l'éducation2(*) pourrait servir de support à une concertation approfondie entre les collectivités et les établissements d'enseignement supérieur. Malheureusement, les commissions territoriales ne sont pratiquement jamais réunies. Beaucoup de collectivités ont néanmoins mis en place des services de vie étudiante et créé des postes de chargés de mission qui permettent d'avoir une connaissance plus ou moins empirique de la population étudiante sur leur territoire.

Indépendamment du covid et avant la crise sanitaire, nos collectivités ont mis en place des dispositifs pour les étudiants installés sur leur territoire. Peu de communes ont déployé des aides directes dédiées spécifiquement aux étudiants, ces dernières étant destinées à la jeunesse dans sa globalité. La ville de Dunkerque, par exemple, a mis en place un revenu minimum étudiant ainsi que le dispositif « Parcours de réussite - aide aux études », dont l'objectif est d'aider les jeunes de moins de 30 ans habitant la commune depuis au moins deux ans dans la réussite de leurs études supérieures ou d'études spécifiques, via une aide de 450 euros par an. La commune de Valence a quant à elle élaboré un contrat municipal étudiant, au terme duquel les étudiants perçoivent une aide financière de la municipalité et s'engagent, en contrepartie, à être assidus aux cours et participer à une ou plusieurs missions au sein de la ville, de l'agglomération ou d'une association. En 2019, 184 étudiants ont bénéficié de ce contrat et perçu 1 360 euros en moyenne. Un accompagnement est également proposé aux étudiants de troisième cycle, sous forme d'allocation doctorale ou de bourse de recherche. Nous accueillons également des doctorants en convention CIFRE3(*)Malheureusement, nos collectivités peuvent rarement titulariser les jeunes docteurs formés au sein de leurs effectifs, puisqu'elles ne bénéficient pas de l'aide du crédit impôt recherche, qui est réservé au secteur privé.

En ce qui concerne les services proposés à titre gratuit ou à tarif réduit, et plus particulièrement de la réduction des tarifs de transports en commun, une enquête de 2018 menée par l'AVUF a révélé que nos établissements publics de coopération intercommunaux (EPCI) consacraient un budget significatif à la prise en charge de réductions sur les abonnements mensuels. Ces réductions varient de 16 à 80 % selon les villes, avec une moyenne de 50 %. D'autres communes ont instauré des tarifs plus sociaux pour certains publics, comme ceux qui bénéficient de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) ou qui sont éligibles aux échelons les plus élevés des bourses sur critères sociaux. En matière de santé, l'AVUF vient de lancer une démarche d'observation territoriale, à la fois sur l'état de santé des étudiants et sur toutes les actions mises en oeuvre par les collectivités pour faciliter l'accès au soin et lutter contre les comportements à risque et conduites addictives. Un premier webinaire s'est tenu le 26 mars sur le sujet et nous travaillons à l'élaboration d'un projet territorial de santé mentale. S'agissant de l'insertion professionnelle, nous soutenons la professionnalisation des étudiants en facilitant l'accès aux stages.

Depuis le début de la crise, nous avons mis en place dans certaines villes des actions spécifiques. Nos missions locales reçoivent en outre un grand nombre d'étudiants décrocheurs. Bien qu'ils aient souvent un statut d'étudiant jusqu'à la fin de l'année, ils ne se considèrent plus comme tels. Nos missions locales les aident à se projeter dans un avenir professionnel.

En ce qui concerne l'alimentation, je souhaiterais souligner la différence entre les villes universitaires de grande taille et celles qui comptent moins de 3?000 étudiants. Dans ces dernières, les Crous considèrent qu'il n'est pas possible d'installer de restaurant universitaire. Les communes mettent alors en place différents types d'approches, avec des conventionnements, restaurants municipaux, cantines d'établissement d'enseignement secondaire, etc. Nos collectivités sont également très engagées dans le soutien à la vie associative et aux initiatives citoyennes, avec la mise à disposition de locaux et l'organisation d'événements. L'AVUF mène ainsi avec plus de 25 villes l'initiative « Nuit de l'étudiant du monde, » une manifestation d'hospitalité à l'attention particulière des étudiants internationaux qui ont choisi la France pour étudier. Je souhaite également citer l'initiative de concertation menée par la ville de Toulouse, qui a créé un Conseil toulousain de la Vie étudiante, réunissant 60 étudiants volontaires pour s'investir sur des thématiques en lien avec la vie étudiante.

D'autres dispositifs sont destinés à améliorer les conditions de vie des étudiants. En matière de logement, la Fédération nationale des agences d'urbanisme (FNAU) vous a présenté il y a deux semaines une démarche commune d'observatoires territoriaux du logement étudiant. Je souhaite rappeler le rôle majeur des collectivités en matière de logement étudiant, qu'il s'agisse des démarches que les villes peuvent mener vis-à-vis de leurs offices, de garanties d'emprunt qui peuvent être accordées pour la construction de résidences étudiantes, ou encore des plans locaux d'urbanisme.

Je souhaite vous parler de notre récente initiative, le label « qualité » pour les ?résidences étudiantes?, qui a pour objectif de différencier aux yeux des étudiants et de leur famille les résidences qui font le plus d'efforts de qualité dans les logements et la vie sociale. L'objectif est de cibler les résidences étudiantes privées et conventionnées ouvertes à tous. À la différence des résidences du Crous et des grandes écoles, qui font l'objet d'une attribution administrée, la majorité de ces résidences étudiantes dans nos villes sont réservées à distance par les étudiants et leurs parents, uniquement au regard de critères comme le prix ou la localisation approximative. Ces derniers font ainsi parfois face à de grandes déconvenues lors de leur arrivée sur les lieux. Ce travail permet également aux villes universitaires concernées de travailler sur la qualité de l'offre. Ce label national est décliné localement, sur chaque agglomération volontaire.

Vous souhaitiez également savoir comment les étudiants sont informés des aides et services dans nos villes. Dans l'immense majorité des cas, nos services de communication ont mis en place une communication digitale sur les réseaux sociaux.

S'agissant du budget moyen consacré à la vie étudiante par les collectivités que nous représentons, notre étude de 2012 faisait apparaître un budget de 0,17 à 3,55 euros par étudiant. Ceci ne prend pas en compte les moyens humains, les bonifications sur les transports en commun et les déficits de recettes sur les infrastructures sportives et culturelles.

Sur une collectivité comme la mienne, le budget de fonctionnement s'établit à 1 million d'euros par an et le budget investissement repose sur des plans pluriannuels qui dépassent chaque année 7 à 8 millions d'euros.

En matière d'aménagement du territoire, je souhaite insister sur deux idées qui nous tiennent particulièrement à coeur. L'enseignement supérieur n'est pas un outil d'aménagement du territoire mais il y participe, a fortiori parce qu'il s'agit d'un outil d'égalité des chances. Dans certains départements, c'est la présence sur place d'un IUT qui permet aux jeunes d'avoir accès à l'enseignement supérieur. Il s'agit donc pour nous d'un enjeu majeur. C'est la raison pour laquelle nous demeurons très vigilants face au phénomène récent de concentration de l'enseignement supérieur français dans e grandes métropoles. Pour certaines villes comme Lyon ou Toulouse, la concentration de la population étudiante pose des difficultés en termes de transport ou de logement ; en parallèle, le lien avec d'autres territoires de proximité permet d'offrir une meilleure qualité d'accueil. Enfin, je vous conseille la lecture d'une étude datant de mars 2021 réalisée par l'université de Reims-Champagne-Ardennes : «?Quel impact socioéconomique pour le territoire ??».

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