Intervention de Élise Nuret

Mission d'information Conditions de la vie étudiante — Réunion du 6 mai 2021 à 11h00
Crise sanitaire et aide alimentaire pour les étudiants — Audition de représentants d'associations

Élise Nuret, vice-présidente de l'association AGORAé :

Comme cela a été dit, la précarité étudiante n'est pas une problématique nouvelle. La FAGE a créé le projet AGORAé il y a dix ans en ouvrant la première antenne à Lyon en 2011. Aujourd'hui, ce sont 27 AGORAé qui distribuent chaque jour à de nombreux étudiants des produits alimentaires, hygiéniques ou d'entretien. Si la précarité étudiante a largement été médiatisée depuis 2019 et durant cette crise, les dispositifs mis en place ne sont pas pérennes. Il nous semble pourtant important qu'ils soient poursuivis via des accompagnements quotidiens.

Le projet AGORAé est fait par et pour les étudiants, ce qui permet d'être le plus au fait des problématiques quotidiennes. Nos épiceries accueillent sans condition de ressources, même si, au vu de la demande, il est impossible d'aider tout le monde. Avec l'aide de la FAGE et des territoires, de nombreuses AGORAé ont été créées partout en France. À Paris, nous avons distribué 1 000 paniers en mars dernier, ce qui constitue un très petit chiffre en comparaison de la demande. Les témoignages des étudiants ont également été très frappants, certains nous disant qu'ils n'avaient pas mangé durant plusieurs jours - je me souviens d'un témoignage faisant état d'une pomme pendant tout un week-end ! Parallèlement au dispositif pérenne des épiceries, nous distribuons des repas chauds - 4 000 depuis le mois de janvier.

Les profils d'étudiants que nous rencontrons sont très variés : famille à l'étranger qui ne peut pas aider, rupture familiale, coût onéreux des études, écoles qui ne proposent pas d'aide sociale, accès aux bourses limité ou perdu. Les étudiants étrangers, qui n'ont pas accès aux bourses, représentent 80 % des étudiants que nous accueillons.

Les achats de matériel indispensable ont fragilisé le budget alimentaire de nombreux étudiants, tout en contribuant à leur endettement. Je ne peux qu'aller dans le sens de ce qui a été dit sur le non recours des étudiants à l'aide alimentaire, même si leur précarité alimentaire est aujourd'hui assez banalisée. Les associations étudiantes, par leur proximité avec les étudiants, peuvent permettre d'abaisser cette barrière.

S'agissant des partenariats, nous avons essentiellement travaillé avec l'Université de Paris et Sorbonne université, qui nous fournissent aides financières, lieux, accompagnement et aide à l'organisation. Depuis cinq ans nous travaillons avec les Crous, la mairie de Paris et, d'une manière générale, avec les collectivités territoriales. Comme Linkee, nous reprenons les invendus tout en essayant de nous organiser de manière écologiquement responsable.

Nous avons constaté une forte hausse de la mobilisation étudiante : 250 bénévoles sont arrivés d'un coup au mois de novembre dernier. Nous avons également vu l'entraide nationale grâce aux nombreux contacts d'entreprises et d'associations dont nous avons bénéficié, même si, au vu de la demande, l'aide est toujours insuffisante.

Le repas du Crous à 1 euro a été une excellente initiative, néanmoins le repas était, jusqu'à fin janvier dernier, uniquement accessible aux étudiants boursiers et seulement mis en place dans les restaurants universitaires et non dans les cafeterias. En outre, la nécessité de disposer d'un compte bancaire n'a pas facilité les choses. Enfin, la qualité des repas proposés, tout du moins au début, n'était pas particulièrement qualitative.

S'agissant du ticket restaurant étudiant, cette mesure remet en cause l'équilibre nutritionnel des étudiants ainsi que la restauration écoresponsable et durable des Crous. De la même manière, elle a pour conséquence immédiate que les étudiants se rendent moins dans les lieux de vie que sont les Crous, ce qui aggrave leur isolement social.

S'agissant des pistes de réflexion, il existe déjà de nombreux dispositifs de solidarité. Il faudrait travailler à leur visibilité ainsi qu'à la coordination entre les différentes associations, qui fonctionne déjà très bien. Nous pouvons également proposer, dans une logique pérenne, de nouvelles alternatives financières aux étudiants, comme la garantie jeunes universelle, proposée par la FAGE, tout en valorisant les engagements étudiants, tels que le volontariat en service civique.

- Présidence de M. Stéphane Piednoir, vice-président -

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