J'élargirai la question terroriste au cas du gazoduc Nord Stream, et aux menaces hybrides qui n'incluent pas forcément des groupes armés étatiques. Il est évident que ces réalités sont prises en compte. La Marine nationale dispose d'une expertise dans le contre-terrorisme maritime, avec des doctrines et entrainements adaptés. Sous les mers se trouvent des gazoducs, des câbles de communication, mais aussi des câbles électriques, ce qui pose la question de la maîtrise des fonds marins en vue de la protection de ces infrastructures critiques. Toutes les grandes puissances travaillent à développer leurs capacités en ce domaine. Cette question est donc déjà prise en compte.
Concernant l'énergie nucléaire, il faut rappeler que la Russie était, en 2022, l'acteur dominant de ce secteur dans le monde. Le conflit en Ukraine modifie le contexte, mais en partie seulement, car la Chine et la Russie continuent d'investir massivement dans les technologies nucléaires d'avenir. Ce sont les deux seuls pays à bénéficier de réacteurs de quatrième génération. Le réacteur chinois HTR-PM permet la production d'hydrogène bas-carbone, non par électricité nucléaire, mais par chaleur nucléaire. Ce duopole russo-chinois développe la technologie des réacteurs à neutrons rapides, dont l'intérêt principal réside dans l'absence de déchets de longue vie.
Aujourd'hui, les pays traditionnels du nucléaire comme les États-Unis, les pays européens ou le Japon sont en retard par rapport à la Russie et à la Chine, mais beaucoup de projets sont à l'étude, notamment autour de petits réacteurs. Les États-Unis ont énormément investi, avec une architecture étatique multi-agences qui soutient des projets portés par des acteurs privés, comme Bill Gates. Lorsque ces technologies seront matures, elles ouvriront de nouvelles perspectives pour le nucléaire, qui ne sera plus à vocation uniquement électrique. Nous pouvons évoquer le nucléaire de cogénération (électricité et chaleur), le nucléaire d'électricité pour produire de l'hydrogène, le nucléaire de propulsion pour des missions spatiales futures. Au Royaume-Uni, Rolls-Royce a signé avec l'équivalent britannique du Centre nationale d'études spatiales (CNES) un accord de développement d'un réacteur nucléaire destiné à l'exploration spatiale.
Nous ne serons donc pas confrontés au risque que le premier entrant s'empare de toutes les parts du marché, car ces marchés devraient se diversifier.