Intervention de Yves Jégourel

Commission des affaires européennes — Réunion du 2 mars 2023 à 9h00
Énergie climat transports — Table ronde « l'europe face à la nouvelle géopolitique de l'énergie » avec m. nicolas mazzucchi directeur de recherche au centre d'études stratégiques de la marine cesm ; m. yves jégourel professeur titulaire de la chaire économie des matières premières du conservatoire national des arts et métiers co-directeur du cercle cyclope ; mme blandine barreau analyste de l'équipe des perspectives énergétiques mondiales à l'agence internationale de l'énergie.

Yves Jégourel :

La question de la spéculation est extrêmement importante, et pas suffisamment évoquée. Cette notion est très pratique pour expliquer l'augmentation des prix du gaz ou du blé : elle permet de cibler un spéculateur et de ne pas se poser les vraies questions.

Il faut différencier la spéculation physique de la spéculation financière. La première est assez naturelle : il s'agit du stockage, avec comme objectif de prévenir un éventuel hiver rude et de se fournir en amont à des prix raisonnables. La spéculation financière pose beaucoup de problèmes. Elle est liée à l'utilisation de contrats à terme. Certains responsables politiques pointent la cotation en bourse de 90 à 95 % des matières premières, et notent que ces contrats financiers ne donnent pas lieu à de la livraison physique de matières premières. Ils concluent à la folie du monde et à l'omniprésence de la spéculation.

Il est important de comprendre que le premier rôle de ces contrats à terme est de gérer l'instabilité des prix, qui peut toucher l'ensemble des matières premières. Nous parlons alors de financiarisation, et nous avons besoin de ces outils pour gérer cette instabilité. La condition de cette financiarisation est la spéculation : le marché ne fonctionne pas sans spéculateurs.

Faut-il supprimer la spéculation financière ? Si la réponse politique est oui, alors nous devons supprimer les marchés à terme de matières premières, et donc supprimer des solutions de gestion du risque de prix. Les industriels ou le monde agricole se retrouveraient alors face au problème initial : comment gérer cette instabilité ? Se poserait donc la question d'un rôle accru de l'État pour la gérer. Cela ne correspond pas à la tendance actuelle, comme nous le constatons avec la politique agricole commune (PAC).

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