Intervention de Moritz Kraemer

Mission commune d'information Agences de notation — Réunion du 9 mai 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Moritz Kraemer responsable de la notation de la france chez standard & poor's et de Mme Carole Sirou présidente de standard & poor's france

Moritz Kraemer, responsable de la notation France chez Standard & Poor's :

Vous évoquez la croissance économique. La méthodologie que nous utilisons est publique : vous verrez que le taux de croissance n'a pas autant d'impact qu'on le pense sur la valeur du crédit d'un pays. La Norvège a un taux de croissance inférieur à celui du Brésil mais le Brésil a une notation inférieure car il existe là-bas certaines caractéristiques structurelles économiques qui font que nous pensons que le pays est moins robuste que la Norvège.

En Europe, on parle beaucoup des ratios de dettes. C'est un pourcentage qui reflète le niveau de la dette par rapport à la croissance et c'est un vrai problème pour beaucoup de pays. On le dit depuis très longtemps et c'est pourquoi, au mois de janvier, nous avons modifié l'évaluation de certains pays car nous avons estimé qu'on travaillait trop sur les dettes et les déficits et qu'il était préférable de se concentrer sur les possibilités de croissance.

Dans quelle mesure nos prévisions sont-elles fiables ? Notre économiste, Jean-Michel Six, travaille sur les prévisions et nous menons le travail de tout expert en étudiant le PIB, les composantes de la demande, le niveau de consommation du secteur public et privé, les importations, les exportations, la constitution des stocks ainsi que les moteurs de la demande dans chaque pays. C'est ce qui a fait, qu'au bout du compte, nous avons été plutôt sceptiques concernant les perspectives de croissance de l'Espagne car, dès que vous enlevez de l'équation le financement par le crédit, les moteurs de croissance retombent à un niveau extrêmement modeste.

Certes, on n'arrive jamais à cibler totalement le chiffre parfait. Notre prévision peut-être de 1 % et la croissance finalement se révéler de 1,3 %. Ce sont des estimations. C'est différent du travail d'audit, dans lequel il ne s'agit pas d'estimations -bien que personne ne puisse être totalement certain des chiffres, même de ceux du PIB.

Nos prévisions sont cependant utiles, dans la mesure où elles nous ont toujours apporté une perspective réaliste concernant les économies des différents pays. Nous avons ainsi vu des positions trop optimistes et je pense qu'il est bon qu'on n'adopte pas automatiquement les estimations officielles. Nous arrivons à nos propres estimations car si on étudie le passé, on voit que les prévisions de la plupart de pays réalisées par leur propre Gouvernement sont trop optimistes.

Que la croissance soit de 1 % ou de 2 % d'ici un an à trois ans ne change pas la notation. Celle-ci devrait être stable et permettre à un pays de traverser un cycle économique. Nous ne voudrions pas dégrader la notation en temps de crise et l'améliorer en temps d'économie florissante. En ce moment, on vit un cycle économique qui constitue un vrai changement. Un cycle signifie que l'on se retrouve, à la fin de la crise, au même endroit qu'avant celle-ci. Je ne pense pas que l'on se retrouve dans un proche avenir dans la même situation qu'en 2005. Je pense que les modifications à la baisse reflètent en fait une faiblesse structurelle dans les différentes économies européennes et ailleurs.

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