Intervention de Delphine Colin

Commission d'enquête Cabinets de conseil — Réunion du 9 février 2022 à 16h30
Audition des syndicats de la fonction publique autour de M. Luc Farré secrétaire général de l'unsa fonction publique Mme Mylène Jacquot secrétaire générale de la cfdt fonction publique et M. Sébastien Naudy représentant de la fédération cgt des services publics

Delphine Colin, secrétaire nationale de l'Union fédérale des syndicats de l'État CGT :

Votre commission d'enquête a évoqué le rapport sur l'avenir du métier d'enseignant, qui a coûté 496 800 euros. La CGT en a appris l'existence par voie de presse, et à aucun moment les organisations syndicales n'ont été consultées sur ce scandale. Scandale, car qui est plus expert de son travail et ses besoins pour l'avenir que les enseignants et enseignantes, et les organisations syndicales qui les représentent ?

Cette somme de 496 800 euros, déjà importante, n'est qu'une goutte d'eau dans l'océan des fonds publics utilisés pour gaver, si vous m'autorisez ce terme, les cabinets privés, alors que les suppressions d'emploi et les fermetures de services de proximité se multiplient. Depuis la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) et la réduction constante des plafonds d'emplois, les cabinets pullulent dans le paysage des administrations. Cela s'apparente à une délégation de service public déguisée.

La question de la déontologie et du conflit d'intérêts se pose également pour ces cabinets de conseil, qui se partagent le gâteau des administrations et font souvent partie de la même obédience.

La circulaire du Premier ministre du 19 janvier 2022, qui institutionnalise l'effet « tourniquet », est lourde de sens pour le service public. Elle relève également d'une certaine hypocrisie, puisqu'elle admet des dysfonctionnements, des manques de moyens alors que nous sommes dans un mouvement de privatisation des fonctions de l'État. De plus, une circulaire n'a aucun pouvoir contraignant. Enfin, le fait qu'elle rappelle de simples règles de déontologie est un aveu en creux de pratiques illégales.

La question de la sécurité des données, abordée tout à l'heure nous semble très importante. Les cabinets de conseil, dans le cadre des missions qui leur sont confiées, ont accès à des données sensibles ou couvertes par le secret professionnel et il n'y a aucune garantie qu'elles ne soient pas utilisées à d'autres fins. À notre sens, la capitalisation ne se fait pas au profit des administrations mais à celui des cabinets de conseil.

Ces cabinets, du fait de leur incompréhension des missions de service public, sont un réel frein à l'adaptabilité des services publics.

La CGT attire enfin l'attention sur les comparaisons internationales faites par Mme Amélie de Montchalin. Il faut prendre garde à ces comparaisons car nous sommes dans des modèles de société différents et pas forcément comparables. Et, en revanche, lorsque nous parlons de différences salariales avec l'étranger, le niveau de comparaison n'est plus le même et les portes se ferment...

Les préconisations de la CGT sur ces questions sont d'assurer l'indépendance stratégique de l'État en réintégrant au sein des administrations des services de veille et de prospective capables de définir des orientations stratégiques pour le service public et mener une réelle réflexion sur ce qu'est l'appareil d'État et sur les moyens qui doivent lui être alloués.

À ce titre la CGT fonction publique mène une campagne « 10 % », d'emploi, de salaire et de réduction de temps de travail. L'enjeu du renforcement de la fonction publique, au service de l'intérêt général, est central pour cette commission d'enquête.

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