La loi Bachelot et la réglementation Seveso, qui font référence à des « conditions économiquement acceptables », entretiennent une ambivalence : cela sous-entend que les contraintes sont trop lourdes. Cette logique s'est traduite concrètement dans le cas de Lubrizol puisque le préfet a pu donner une autorisation administrative d'augmenter la capacité de production et de stockage de produits chimiques dangereux sur le site. Les lubrifiants sont en effet des produits extrêmement toxiques, et les additifs aux lubrifiants encore davantage. La simplification administrative prévue par le code de l'environnement a donc rendu encore plus prégnante l'exigence économique.
Le code du travail prévoit une évaluation complète des risques. Or il n'y a pas de transparence puisque la liste des produits n'est pas accessible au grand public et que le secret industriel s'applique. De mon point de vue, lorsque les substances sont aussi dangereuses, la transparence devrait être totale.
Le leitmotiv, depuis la directive « cancérogènes » de 1991, est qu'il faut à tout prix éliminer les CMR de l'espace de travail. D'un côté, le code du travail préconise une telle élimination ainsi que des précautions extrêmes ; de l'autre, le code de l'environnement prévoit non pas une évaluation environnementale mais une simple autorisation administrative. C'est contradictoire !
Sur le registre de suivi des cancers, il ne s'agit pas de comparer les catastrophes terme à terme, mais d'évaluer la gestion sanitaire qui a ensuite été mise en place. Après l'attentat contre le World Trade Center, les équipes se sont préoccupées des catastrophes à venir, à Tchernobyl aussi ; ce travail est engagé à Fukushima, mais il y beaucoup de « bâtons dans les roues »... Il faut mettre en place un suivi concernant, d'abord, les pompiers, tous ceux qui se sont retrouvés sous le panache, les riverains, les enfants et les femmes enceintes. Cela rend nécessaire une évaluation des risques digne de ce nom, avec l'établissement d'une cartographie de l'ensemble du nuage.
Nous sommes un certain nombre de professionnels de la santé publique et de la santé au travail à souhaiter prendre connaissance du protocole élaboré par Santé publique France, ce qui n'a pas été possible jusqu'à présent.