Il s'agit d'un sujet effectivement très important. Lubrizol n'est pas le seul dossier sur lequel se pose la question des attentes et des difficultés de compréhension de nos protocoles.
Tout ce qui nous importe, c'est la question de l'impact lié à l'incendie. Les substances qui ont été émises lors de l'incendie, et dont le suivi a d'ailleurs été recommandé par l'INERIS et l'ANSES, sont des substances qu'on peut trouver de manière ubiquitaire dans l'environnement, c'est-à-dire indépendamment de cet incendie.
Par exemple, les dioxines/furanes sont des substances émises lors de processus de combustion et sont potentiellement présentes dans la zone industrielle de Rouen, du fait d'autres processus industriels non accidentels.
De même, certains métaux, dont le suivi a également été recommandé, peuvent être présents de manière anthropique dans l'environnement, en plus de cet incendie et également de manière naturelle. Il existe donc de multiples circonstances expliquant la présence de ces polluants dans l'environnement.
La question qui nous est posée concerne l'impact de l'incendie. C'est pourquoi nous cherchons à connaître les substances potentiellement émises à cette occasion. Comme l'a dit Martial Mettendorff, nous nous sommes très rapidement rapprochés de l'INERIS et de l'ANSES pour connaître leurs préconisations en matière de suivi.
L'INERIS ayant réalisé une modélisation du panache, comment va-t-on cibler les substances et les populations ? Il est probable qu'une portion restreinte de la zone géographique modélisée sera concernée par un impact objectivable sur le plan environnemental. Il est pour nous important d'en prendre la mesure.
Nous voulons en effet déterminer l'impact de l'incendie et travaillons sur des substances qui comportent des effets à long terme et induisent des pathologies chroniques, telles les dioxines et furanes dont la cancérogénicité est avérée.
Cependant, il est difficile de prédire, à trente ans, l'incidence de cancers sur des populations exposées au panache. Ces mesures de biosurveillance, qui constituent une expertise que nous avons développée depuis environ quinze ans, sont des outils très puissants pour déterminer l'exposition des populations à un instant T, face à des substances qui ont des demi-vies dites longues, donc rémanentes dans l'environnement.
Cela signifie que, si ces mesures sont opérées dans six mois ou un an, les substances seront toujours présentes dans l'environnement et dans les matrices biologiques des individus. Cette connaissance de l'exposition permet d'objectiver les niveaux d'exposition des populations, d'identifier des populations potentiellement vulnérables. Si on retrouve majoritairement ces substances chez des enfants ou des femmes enceintes, cela permettra de cibler des populations, pour ensuite prendre des mesures de gestion de ces expositions, en vue d'éviter ou de limiter l'apparition à long terme de pathologies dont on serait scientifiquement incapable d'estimer l'impact dans 30 ans à 40 ans.