C'est pourquoi on demande alors deux notations.
En second lieu, la notation n'est pas le seul critère retenu dans notre analyse. Ainsi, les ABS à structure complexe ne sont pas éligibles, quelles que soient les notations obtenues. A l'inverse, des titres souverains des pays sous programme sont restés éligibles alors que leur notation tombait en deçà des seuils de droit commun. Nous favorisons progressivement les produits dont les acteurs de marché sont à même de juger de la qualité, sans avoir besoin de recourir mécaniquement à la notation des agences. C'est bien ce que nous visons pour les titres collatéralisés : les caractéristiques des actifs sous-jacents seront suivies par l'ensemble du marché grâce à des infrastructures dédiées ; y adhérer conditionnera l'éligibilité de ces produits aux opérations de l'Eurosystème.
Enfin, s'agissant des actifs non négociables, à savoir les créances privées, leur importance dépend de la capacité des banques centrales à évaluer les entreprises. C'est au coeur de la politique de la Banque de France, qui s'intéresse de près au financement de l'économie réelle. Elle est passée d'accords préalables de réescompte à un contrôle a posteriori et à la notation des entreprises grâce à un dispositif très important : la Banque de France est devenue une agence de notation et elle note environ 260 000 entreprises françaises. La moitié des actifs déposés en garantie à la Banque de France pour les opérations de banque centrale est d'ailleurs constituée par des créances privées. Cette proportion est inférieure à 20 % dans le reste de l'Eurosystème, ce qui traduit l'absence de mécanisme de notation banque centrale dans la plupart des autres pays de l'Union européenne, puisque seule la Bundesbank, la Banque d'Autriche et la Banque d'Espagne en disposent. Leurs outils sont cependant plus modestes que les nôtres ; ainsi la Bundesbank ne note que 30 000 entreprises.
La place des créances privées dans le refinancement a tendance à progresser car les banques peuvent également s'appuyer sur leurs outils internes d'appréciation du risque, lorsque ces outils ont été validés par les superviseurs bancaires dans le cadre de la réglementation de leur solvabilité. Il s'agit des CRD avec la CRD4 en cours de finalisation.
Indépendamment du type d'actifs mobilisés, les pratiques de l'Eurosystème évoluent afin de limiter la dépendance de nos opérations aux notations, quelles qu'elles soient : avant la crise de 2008, nous n'acceptions que les notations d'excellence avec des décotes très faibles. Depuis, nous avons descendu le seuil d'acceptabilité et augmenté les décotes associées afin de réduire les effets couperets tout en garantissant une prise de risque maîtrisée par la banque centrale en cas de non-remboursement des emprunts. Aujourd'hui, nous allons jusqu'à des signatures équivalent à un double B, évidemment avec des décotes appropriées.