Monsieur le secrétaire général, je formulerai à la fois une remarque et une question.
En siégeant bénévolement, au début des années deux mille, au sein du conseil d'administration d'un grand groupe de presse, j'ai constaté avec stupéfaction que ses membres, tous d'illustres gérants ou directeurs de grands groupes au plan national voire international, arrivaient les mains dans les poches sans avoir consulté les budgets et la certification des comptes qui leur étaient présentés. À l'époque, j'avais été la seule à recourir aux services d'une personne capable de m'éclairer. J'avais constaté que, dans n'importe quel collège de France, on examine avec plus de curiosité et de pugnacité ce qui nous est présenté.
Dans cette entreprise, très honnête au demeurant, s'appliquait le principe de la « confiance mutuelle » : toutes ces personnes se connaissaient, siégeaient dans d'autres conseils d'administration et n'avaient pas l'ombre d'un doute sur l'absence de problème. Je m'étais renseignée pour savoir comment cela se passait dans les autres pays, et l'on m'avait expliqué qu'en Allemagne les actionnaires pratiquaient le système du « dialogue critique ». Il existe à cet égard des études anthropologiques et d'économistes sur l'attitude des actionnaires.
J'en viens à ma question. Vous arrivez en bout de chaîne, vous contrôlez que les commissaires aux comptes ont bien vérifié la sincérité et la régularité des comptes, ne pensez-vous pas que la culture de cooptation, cette « confiance mutuelle » qui règne en France, puisse expliquer un certain nombre de soucis, le travail des commissaires aux comptes étant d'autant plus difficile que les comptes dont ils certifient la régularité, la sincérité n'ont pas suffisamment été examinés par les actionnaires ? Que pensez-vous des pratiques des actionnaires qui siègent dans de nombreux conseils d'administration et qui n'ont matériellement pas le temps d'éplucher les comptes de toutes les entreprises concernées ?