L'innovation comporte quatre phases. Il faut, d'abord, passer du concept à l'idée, via la recherche. Elle seule peut dire, par exemple, comment, techniquement, mettre de l'éolien en mer. Puis, on passe au premier prototype. Dans le numérique, il n'y a, pour cela, guère de barrières à l'entrée : cela peut passer par des start up. Il n'en va pas de même dans l'industrie : quand on veut créer une turbine à gaz, les pièces coûtent entre 50 et 100 millions. On ne trouve pas de start-up dans le domaine du nucléaire... Enfin, il faut transformer l'essai, en parvenant à réussir sur le marché mondial. La France est performante en matière de recherche fondamentale ; elle a de bons entrepreneurs ; mais ses entreprises ne parviennent pas à grossir, c'est là que le bât blesse. Ce point a reçu moins d'attention que les autres. Ce n'est le plus souvent qu'à l'intérieur de grandes structures que l'on trouve ce que j'ai ainsi appelé des intrapreneurs, des gens qui ont une logique entrepreneuriale. Mais il se pose un problème de justice fiscale. Un exemple. Quelqu'un qui crée un site pornographique en ligne peut, grâce à une fiscalité favorable, faire de gros bénéfices en revendant ensuite ses parts, mais en revanche, un chercheur qui reçoit un gros bonus pour avoir inventé un médicament contre la malaria, susceptible de sauver des millions de personnes, est taxé à 75%. On m'objectera que dans le numérique, il y a moins de barrières à l'entrée. Mais dans certains domaines, il faut tout de même s'appuyer sur de grosses structures. Je pense, notamment, à l'identité numérique. La fiscalité envoie des signaux aux acteurs. Il faut qu'ils aillent dans le sens de l'innovation.