Tout cela a abouti à l'échec de l'accord et nous allons voir ses conséquences.
Les discussions avec l'Union reprirent en avril 2021, mais le 26 mai de la même année, le Conseil fédéral annonça qu'il ne signerait pas le projet d'accord et qu'il mettait un terme aux négociations, suscitant de fortes réactions de ses partenaires européens.
Petros Mavromichalis, ambassadeur de l'Union en Suisse et pour la Principauté du Liechtenstein, déclarait ainsi en juin 2021 : « Pendant trop longtemps, l'UE a toléré une situation où la Suisse [...] bénéficiait d'un très large accès à notre marché tout en adoptant de façon sélective les règles qui régissent celui-ci. C'est ce qui s'appelle avoir le beurre (l'accès au marché) et l'argent du beurre (l'autonomie réglementaire). Cela nous pose un problème fondamental car il s'agit d'une violation du principe sacro-saint de l'égalité de traitement des États et des opérateurs économiques ».
Cette rupture des négociations a pour conséquence que les accords existants ne sont pas renouvelés quand ils arrivent à échéance et qu'aucun nouvel accord n'est conclu. Nos relations avec la Suisse sont donc en quelque sorte « gelées ». Nous ne pouvons pas vous décrire de façon exhaustive ce que cela implique, dans la mesure où tant la Représentation permanente française que la Commission européenne nous ont indiqué être encore en train d'évaluer toutes les conséquences.
On peut toutefois souligner des conséquences en matière de reconnaissance mutuelle des certificats de mise sur le marché des produits industriels : l'Union n'a pas mis à jour l'annexe qui concerne les technologiques médicales et les industriels suisses doivent donc désormais faire certifier leurs produits à la fois dans la Confédération helvétique et dans l'Union européenne. De même, le projet d'accord sur l'électricité, discuté depuis 2007, ou celui sur la santé publique, discuté depuis 2008, sont pour l'instant bloqués. Et ces conséquences deviendront de plus en plus importantes, au fur et à mesure que les accords « vieilliront ».
Le tableau de la situation actuelle n'invite pas à un grand optimisme.
Du point de vue de l'Union, on considère que « la balle est dans le camp suisse » et la position commune n'a pas changé : les distorsions dans l'accès au marché commun persistent et doivent être résolues à travers un accord global, qui comporte un mécanisme de règlement des différends.
Du côté suisse, on peut noter plusieurs gestes récents et notamment le versement du milliard d'euros de la cohésion, qui était en souffrance depuis 2012. Il s'agit ainsi de renouer le dialogue avec les autorités européennes. Cependant, les points de blocage qui ont empêché la conclusion de l'accord demeurent et nous ne voyons pas, à ce stade du moins, d'élément nouveau qui permettrait de débloquer la situation.
Les élections fédérales suisses de 2023 se rapprochent, ce qui ne facilitera pas l'obtention d'un compromis. De même, les autorités suisses privilégieront peut-être des accords au cas par cas, mais la position européenne consiste justement à refuser cette approche sectorielle, au profit d'un accord global.