En réalité, le bilan de votre politique en matière de lutte contre la délinquance est peu probant. Ce n’est pas faute d’avoir, depuis 2002, fait voter par le Parlement des lois toujours plus dures !
Ce texte sera la vingt-troisième loi sécuritaire depuis la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, dite « LOPSI I ». Je ne pense pas que lui accoler le terme de « performance » contribuera à la rendre plus efficace ! Par conséquent, à quoi bon cette nouvelle loi ?
Permettez-moi de douter, en effet, du bien-fondé d’une logique législative inflationniste dont les maîtres-mots sont « stigmatiser », « ficher », « surveiller », « punir » et « enfermer ».
Les événements horribles qui viennent d’avoir lieu nous amènent une nouvelle fois à poser cette question. Nous sommes tous affreusement choqués par le meurtre atroce de la jeune Laëtitia, par la terrible souffrance infligée à sa famille et à ses proches.
C’est cette horreur même qui rend encore plus inquiétants et inacceptables les nouveaux écarts de langage du Président de la République, oubliant tout de ses promesses de 2007 et désignant des coupables : « Ceux qui ont couvert ou laissé faire cette faute ».
Vous-même, monsieur le ministre, et votre collègue garde des sceaux, étiez déjà partis à la chasse aux lampistes ! Cette attitude est indigne du respect dû à la victime et à ses proches dans un moment où la gravité est de mise.
C’est une insulte aux personnels qu’ils soient conseillers d’insertion et de probation, qu’ils soient juges d’application des peines ou policiers.
Avec leurs organisations syndicales, avec leur hiérarchie, ils tirent depuis longtemps la sonnette d’alarme sur l’impossibilité de faire leur travail dans des conditions normales en raison de l’insuffisance évidente des effectifs.
Le Gouvernement a toujours refusé de les entendre. Et aujourd’hui, ce seraient eux les responsables ?
À qui ferez-vous croire que créer un office de suivi pour le repérage des délinquants dangereux, des cellules départementales de synthèse et de recoupement, renforcer – encore et encore – le fichage serait d’une quelconque utilité ?
Il est plus qu’urgent de regarder la réalité en face, de cesser d’affirmer que la révision générale des politiques publiques, la RGPP, est la bonne voie et qu’il faut inscrire la maîtrise des déficits publics dans la Constitution. Les dépenses publiques – ne vous en déplaise ! –, ce sont les dépenses utiles à nos concitoyens.
Il manque 1 000 conseillers d’insertion et de probation rien que pour couvrir les besoins nouveaux issus de la loi pénitentiaire, et encore plus pour assurer un suivi régulier des personnes dont ils ont la charge.
À Nantes, ils suivent en moyenne 135 dossiers, alors que les recommandations définissent un seuil de 60 dossiers maximum. Je connais, monsieur le ministre, votre goût pour les exemples étrangers : au Canada, le suivi est de 40 dossiers par agent et en Suède, il y a un agent pour 25 délinquants.