Au nom de l'AMF, je me propose dans un premier temps de présenter ce qui nous convient dans la proposition de loi sénatoriale et qui va dans le bon sens, sous le bénéfice de quelques ajustements rédactionnels, puis d'évoquer dans un second temps les quelques sujets sur lesquels nous avons des points de vue différents et des interrogations.
D'une manière générale, l'AMF s'inscrit dans la mise en oeuvre du « ZAN », dont nous partageons les objectifs. Il ne faut donc pas en affadir sa mise en oeuvre. Dans la proposition de loi du Sénat, certains aspects nous paraissent aller dans le bon sens et ne méritent pas de développements supplémentaires.
La prolongation d'un an du calendrier des SRADDET correspond à une réalité. Le repousser d'un an ne nous pose donc pas de difficultés, étant observé toutefois que si l'on suit les procédures habituelles de révision des SRADDET, des SCoT et des PLU, la mise en oeuvre risque de ne pas se faire avant 2028 ce qui, par rapport à l'objectif de 2031, poserait difficulté. Il est donc important que la période de modification des SRADDET ne dure pas trop longtemps.
Par ailleurs, concernant les SRADDET, il nous faut respecter la loi initiale et non les décrets existants, qui ont été attaqués devant le Conseil d'État. La loi dit que le rapport juridique entre SRADDET d'une part, et SCoT et PLU de l'autre est un rapport de simple prise en compte et non de compatibilité.
En effet, il ne nous semble pas que ce soit aux SRADDET de déterminer les secteurs dans lesquels on devrait densifier ou non, conserver du foncier ou non. Cela relève bien des SCoT eux-mêmes, qui sont maîtrisés par les élus locaux, et dans lesquels ni les élus urbains ni les élus ruraux ne sont automatiquement majoritaires.
La prise en compte des efforts de renaturation dès 2021 corrige un oubli de la loi initiale et va donc dans le bon sens.
La question des projets d'envergure nationale et européenne, pour l'AMF, ne peut peser uniquement sur les régions dans lesquelles ces projets sont organisés. Soit il existe une péréquation, soit on les ajoute à l'enveloppe des régions ; tout dépend de leur ampleur. S'il s'agit de 4 % du total, les ajouter ne perturbe pas considérablement la mise en oeuvre du « ZAN ». Si c'est 20 %, c'est un autre sujet.
Ce qui est important pour nous, c'est que le Gouvernement précise les projets concernés, de manière à ce que les choses soient connues et que les règles de répartition et de péréquation soient acceptées.
L'articulation du « ZAN » avec les projets d'intérêt général pose la question de savoir qui reconnaît les projets autres que les projets d'intérêt national ou européen. Nous souhaitons que l'État présente les projets envisagés en toute transparence pour en évaluer l'intérêt et l'impact. Il ne nous paraît pas juste que seules les régions déterminent les projets d'intérêt régional qui viendraient s'imputer sur l'enveloppe de chaque territoire, car nous serions dans ce cas proches de la tutelle d'une collectivité sur une autre.
C'est donc à partir d'un processus multipartenarial entre l'État, les régions, les conférences régionales des SCoT et les élus locaux que la liste des projets d'intérêt général ayant un impact significatif à l'échelle d'une région doit être arrêtée. Il est important que les allocations en faveur des SCoT soient justes et ne soient pas biaisées par des choix de l'État ou des régions qui favoriseraient tel territoire par rapport à tel autre. C'est un élément très important de compréhension et d'acceptabilité du « ZAN ».
Nous avons par ailleurs un certain nombre de questions, dont une sur la garantie rurale.
Tout d'abord, dans le cadre des 20 propositions adoptées par son bureau, l'AMF attire l'attention sur une partie des communes rurales situées dans les zones de revitalisation rurale (ZRR), où il n'y a eu que très peu de projets au cours des dix dernières années : pas grand-chose divisé par deux aboutit à presque rien. Pour ces territoires, il nous semble que la réponse ne consiste pas en une allocation de principe. Il faut prévoir dans la loi que chaque SCoT ou chaque autorité qui dispensera ces allocations doive le faire en faveur de projets compatibles avec les projets de développement des communes concernées.
En revanche, nous ne demandons pas à ce que toutes les communes rurales soient traitées. Une partie très importante de ces communes est en extension démographique et située dans les territoires périurbains et ruraux proches d'agglomérations, dans des régions ou dans des départements qui se développent eux-mêmes fortement. C'est là qu'on a le plus développé et consommé au cours des années passées.
J'attire l'attention sur le fait qu'un hectare par commune rurale, quels que soient sa localisation, son passé et sa situation actuelle, peut aboutir à des aberrations. Je suis maire de Bourg-en-Bresse, président de Grand Bourg Agglomération - 140 000 habitants, 74 communes, dont une quarantaine de moins de 10 000 habitants, la plus petite en comptant 85, la plus importante 45 000. De 2012 à 2000, nous avons consommé 732 hectares, donc 73 hectares par an. Si nous devons diviser notre objectif par deux, nous devrions être à environ 35. Parmi nos 74 communes, 65 sont rurales. L'allocation par principe d'un hectare par commune est incompatible avec l'évolution des SCoT.
C'est pourquoi l'AMF souhaite faire en sorte que les SCoT, dans ces territoires, procèdent à l'allocation. Dans mon SCoT, les communes rurales sont majoritaires. Il n'y a donc pas de raison de penser que, dans la répartition interne entre les enjeux liés à l'habitat, les enjeux économiques et les enjeux d'équilibre territorial, les communes rurales, qui sont majoritaires, soient défavorisées.
Il faut que les SCoT bénéficient de cette liberté. En revanche, nous souhaitons une garantie minimum pour les territoires où l'on n'a quasiment pas enregistré de consommation d'espace ces dernières années. On ne peut allouer un hectare à chacune des 32 000 communes rurales, sauf à remettre complètement en cause l'objectif de la réduction de l'artificialisation des sols.
Enfin, nous pensons qu'il convient que l'outre-mer fasse l'objet de règles spécifiques liées à la particularité de ses territoires et que les communes concernées par le recul du trait de côte, en métropole ou outre-mer, bénéficient de mesures d'adaptation, qui pourront être précisées au cours des années à venir, afin de bénéficier de possibilités d'artificialisation au fur et à mesure qu'elles devront déplacer leurs constructions.
Que propose-t-on ? Nous proposons que la loi oblige les SCoT, dans les communes en ZRR ou en ZRR+, dans lesquelles la consommation d'espaces, au cours des dix dernières années, a été nulle et où la population s'est réduite, à prévoir une allocation compatible avec les perspectives de développement de ces communes, afin que l'obligation de résultat soit transférée au niveau des SCoT.
Jusqu'en 2031, on ne parle pas d'artificialisation mais de consommation d'espace dans les PLU. On ne parle pas de la question de savoir comment évaluer les pelouses artificialisées, puis replantées. Ce sont aujourd'hui des enjeux de consommation d'espace.
Nous pensons qu'il faut que les lieux de mise en oeuvre principaux que sont les SCoT soient très vite saisis de ce sujet, pour trouver les bons équilibres entre le développement de l'habitat - 65 % de la consommation moyenne ; le développement économique et la réindustrialisation - 25 % au cours des dernières années ; et le temps de réaliser les arbitrages pour que le « ZAN » ne devienne pas une simple règle à calcul, mais une politique d'aménagement.