Il y a, derrière ces coopérations, des enjeux juridiques. L'échange de données permet de contourner la loi quand elle interdit sur le territoire une surveillance de la population nationale. Les Allemands peuvent ainsi, par exemple, avoir dans les mains des données sur leurs citoyens...recueillies par les Suédois. Didier Bigo n'hésite pas à parler de guilde transnationale des professionnels du renseignement, qui entretiennent plus de liens entre eux qu'avec les acteurs institutionnels de leur propre pays chargés de faire respecter les libertés civiles.
Les Etats seuls ne sont pas impliqués, les sociétés privées le sont aussi. Les programmes de surveillance reposent largement sur les sociétés de télécoms et les grands fournisseurs de services, dont la collecte fait partie du coeur de métier.
On entend souvent poser le problème en termes d'équilibre entre liberté et sécurité, droits des citoyens et efficacité de la lutte antiterroriste, sans qu'ait été donnée aucune preuve de cette efficacité. Au contraire, même, puisque le directeur de la NSA, après avoir déclaré que cinquante-quatre attaques ont pu être évitées grâce à l'action de ses services, n'a bientôt plus parlé que de treize cas, avant de devoir reconnaître qu'au vrai, ils n'avaient mis au jour qu'un seul vrai cas de financement du terrorisme... La vérité, c'est que ce sont, à proprement parler, les valeurs fondamentales de nos ordres démocratiques qui sont en jeu.