Intervention de Pascale Gruny

Commission des affaires européennes — Réunion du 25 juin 2020 à 8h35
Questions sociales travail et santé — Évaluation des technologies de santé - proposition de résolution européenne et avis politique de mmes pascale gruny et laurence harribey

Photo de Pascale GrunyPascale Gruny, rapporteure :

Laurence Harribey et moi avons souhaité, avec l'accord de notre président Jean Bizet, revenir sur la proposition de règlement relative à l'évaluation des technologies de santé présentée par la Commission européenne en février 2018.

Pour rappel, les technologies de santé regroupent les médicaments, le matériel médical et les modes opératoires. L'évaluation d'une technologie de santé comprend deux volets : d'une part, une évaluation clinique comparative destinée à déterminer l'efficacité relative d'une technologie déjà autorisée sur le marché de l'Union, d'autre part, une évaluation non clinique relative à des questions éthiques ou économiques. Ces évaluations sont réalisées par les États membres pour déterminer notamment la politique de remboursement de ces technologies par leur système de sécurité sociale.

Cette proposition de règlement visait principalement à coordonner l'action des États membres dans le domaine de l'évaluation clinique des technologies de santé.

Avec ce texte, la Commission entend instituer un groupe de coordination composé de représentants des États membres qu'elle co-présidera et auquel elle apportera un soutien logistique et financier. Ce groupe devra décider des évaluations cliniques qui seront réalisées en commun. Les résultats de celles-ci devront être repris par les États membres qui ne pourront plus réaliser leurs propres évaluations cliniques. C'est là, le vrai sujet de cette proposition.

Outre la réalisation d'évaluations cliniques communes, le groupe de coordination pourra aussi travailler à identifier les technologies de santé émergentes, organiser des consultations scientifiques communes pour les technologies en développement et approfondir la coopération volontaire dans le domaine de l'évaluation globale des technologies de santé.

Le Sénat, à l'initiative de notre commission, avait adopté en avril 2018 un avis motivé sur ce texte qui ne nous semblait pas respecter le principe de subsidiarité.

En effet, la santé demeure une compétence des États membres. L'article 168 paragraphe 7 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne prévoit que « l'action de l'Union doit être menée dans le respect des compétences des États membres en ce qui concerne la définition de leur politique de santé, ainsi que l'organisation et la fourniture de services de santé et de soins médicaux. Ces compétences incluent l'allocation des ressources notamment financières affectées aux soins ».

Cette position était également celle des gouvernements allemand et français. Les deux chambres des parlements tchèque et allemand ont également adopté un avis motivé sur le sujet ; l'Assemblée nationale française et les deux chambres du parlement polonais ont elles aussi considéré cette proposition contraire au principe de subsidiarité, sans pour autant adopter d'avis motivé.

La Commission européenne, quant à elle, justifie sa proposition en s'appuyant, d'une part, sur l'article 114 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne qui lui octroie une compétence d'harmonisation des réglementations pour assurer un meilleur fonctionnement du marché intérieur, et, d'autre part, sur le fait que seule la partie clinique de l'évaluation sera faite en commun.

Compte tenu de l'opposition d'un certain nombre d'États membres à ce texte, je dois vous avouer que nous ne pensions pas que la nouvelle Commission européenne reprendrait ce texte à son compte. C'est pourtant ce qu'a annoncé Mme Stella Kyriakides, commissaire européen à la santé dans son programme de travail.

Dès lors, il nous est apparu nécessaire de revenir également sur ce texte pour rappeler que la construction du marché intérieur ne peut se faire au détriment de l'obligation d'assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine, d'une part, et de respecter les compétences des États membres, d'autre part.

La crise que nous venons de vivre nous conforte dans cette position. S'il faut réfléchir à une plus grande coordination entre États membres, ce n'est pas dans un objectif économique mais bien dans un objectif sanitaire.

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