C'est la réalité ! Il faut replacer les choses dans leur contexte, celui de la fin des années soixante. En France, on construisait alors le centre de La Hague, et les colis étaient stockés sans reposer sur du béton ! C'étaient les tout débuts, il n'y avait pas d'Autorité de sûreté nucléaire, pas de règles d'assurance qualité, pas de contrôles...
Cela étant dit, je considère que la mine d'Asse II est l'exemple de ce qu'il ne faut pas faire. En réalité, les Allemands ont réutilisé une mine de sel, après l'avoir exploitée au maximum, pour y entreposer des déchets radioactifs. Au départ, cela devait d'ailleurs être une simple expérimentation. Le sel présente des caractéristiques intéressantes, car il est hydrophobe et permet un bon confinement, mais les Allemands ont négligé le fait que cette mine avait tellement été exploitée à fond que la paroi isolant les déchets radioactifs du reste de la couche, qui n'est pas du sel, était devenue si fine qu'il a suffi qu'un peu d'eau s'introduise par une fissure pour dissoudre le sel. Maintenant, les déchets radioactifs baignent dans l'eau...
En matière de stockage géologique de déchets, à l'inverse d'une mine, ce qui est important, ce n'est pas ce qu'on retire du fond, c'est ce qu'on y laisse. Notre argile est un bien précieux : nous veillons à en enlever le moins possible, à l'abîmer le moins possible, car, à terme, c'est elle qui assurera le confinement. Il ne faut donc surtout pas utiliser une ancienne mine pour faire du stockage géologique. Cela étant, il est plus facile de le dire maintenant, avec le recul de l'expérience.
Les Allemands ont un autre projet de stockage dans le sel, mais avec des galeries et une architecture conçues spécifiquement à cet effet. Toutefois, ce projet a été placé sous moratoire voilà dix ans, comme l'ensemble du parc nucléaire allemand. Angela Merkel a déclaré qu'il était urgent de reprendre ce sujet en main. Ce ne sera peut-être pas le site de Gorleben qui sera retenu, car bien qu'il soit pratiquement opérationnel, elle considère qu'il ne bénéficie pas d'une acceptation sociale suffisante. En tout cas, elle a demandé que soit recherché un autre site de stockage géologique en Allemagne, en même temps qu'elle annonçait l'arrêt du nucléaire en Allemagne, peu après la catastrophe de Fukushima. Cela montre bien que ces deux débats sont liés, même s'ils sont de nature différente. Quand bien même la France renoncerait aujourd'hui au nucléaire, il lui faudrait bien régler la question de la prise en charge des déchets, 60 % de ceux de moyenne activité à vie longue et 30 % de ceux de haute activité ayant déjà été produits.