Intervention de Véronique Blanchard

Mission d'information réinsertion des mineurs enfermés — Réunion du 11 avril 2018 à 15h30
Audition de Mme Véronique Blanchard historienne spécialiste de la justice des mineurs ancienne éducatrice enseignante à l'école nationale de la protection judiciaire de la jeunesse

Véronique Blanchard :

Nous répondrons avec un regard historique à vos questions. Depuis deux cents ans, on invoque les familles, considérées comme déficientes, pour expliquer la délinquance et la déviance. C'est ce qui explique qu'elles aient été tenues à l'écart depuis le XIXe siècle jusqu'aux années 1970 : corriger l'enfant impliquait de le soustraire de sa famille ! Cependant, une telle démarche a montré ses limites. Depuis, les praticiens ont pris conscience qu'aucune institution n'est en mesure de se substituer à la famille. C'est pourquoi, une démarche inverse, impliquant le lien avec la famille, fût-elle précaire, a été mise en oeuvre. Des sociologues pourraient approfondir cette réflexion grâce à leur compréhension des évolutions intervenues au cours des quarante dernières années.

Le sentiment d'insécurité est aussi fondamental. Les travaux historiques nous conduisent à affirmer que notre société est peu violente au regard de la situation de ces deux cents dernières années. Mais notre société très pacifiée ne supporte plus le peu de violence qui subsiste. Les enfants de 1945 étaient des enfants extrêmement violents, comme en témoignent les statistiques de l'époque. Et pourtant, l'ordonnance de 1945 va privilégier leur prise en charge et leur protection par la société ! Une telle approche permet ainsi de considérer la violence d'une autre manière pour nos concitoyens. Raconter l'histoire et le quotidien d'un jeune pris en charge par la justice des enfants et sa prise en charge éducative est un travail qui doit être conduit. Je suis parfois surprise par les propos de certains éducateurs en formation qui considèrent la prison comme luxueuse ; cela illustre la méconnaissance par la population des réelles conditions de détention. Connaître mieux un sujet permet de l'aborder de manière plus sereine.

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