Attention au rêve de la prévention ! On ne pourra jamais éradiquer tout comportement déviant de notre jeunesse. À partir du moment où une société se dote de normes, il est évident que certains de ses membres vont tenter de les franchir. Penser que l'éradication de toute délinquance juvénile est possible est une utopie qui a motivé des dérives médicales extrêmes : en 1964, un médecin psychiatre, travaillant dans le cadre de l'éducation surveillée a estimé que le tatouage, fréquent chez les détenus, était le signe que les délinquants seraient moins sensibles que les autres à la douleur. Pour s'en assurer, il a donc piqué les corps des jeunes détenus, sans résultat probant bien sûr.
Les normes qu'on oppose pour identifier un comportement déviant ont changé, comme en témoigne l'évolution de la perception de l'avortement. Que faire à partir du moment où un acte est considéré comme déviant ? Plus on avancera vers la non-violence, plus la tolérance à l'égard des comportements des jeunes va se réduire. Les juges pour enfants nous indiquent que certains actes qui leur sont déférés n'auraient pas été considérés comme relevant de la délinquance, quarante ans plus tôt.
Alors que la situation des jeunes délinquants citadins a été beaucoup étudieé, celle des jeunes ruraux a été largement ignorée. La délinquance rurale est très mal connue, au motif que le contrôle social serait davantage présent et efficace dans les campagnes. Au monde criminogène de la ville s'opposerait le monde purificateur et rédempteur de la campagne, alors qu'un nombre conséquent de jeunes déférés sont issus de la ruralité. La présence de ces stéréotypes est encore confirmée par certains programmes télévisés où l'on voit des jeunes délinquants de banlieue se livrer à des exercices en pleine campagne.
La violence à l'école est un phénomène dont on parle depuis peu. Jusqu'aux années 1960, les sources historiques ne mentionnent pas de problème de violence en milieu scolaire. Un basculement s'opère à cette époque, avec le rallongement de la scolarisation, décidé en 1959, mais effectif à partir de 1967, qui maintient à l'école les élèves jusqu'à seize ans. Ceux qui sont enfermés doivent ainsi être scolarisés jusqu'à cet âge. Pourquoi la dégradation de locaux scolaires est-elle plus intolérable que celle d'un abribus ? Un tel acte suscite une réelle indignation dans le corps social. Les attentes de l'institution scolaire et ce qu'en perçoivent les élèves doivent sans doute être ajustées.
Enfin, lutter contre la méconnaissance de la prison est important. Au-delà de la différence entre la culture des surveillants et celle des éducateurs, le transfert dans une prison est souvent perçu comme un rétrécissement d'horizon par les professionnels qui n'en ont pas l'habitude.