Une perversité du système est que certains investisseurs tels que les fonds des banques ne comptabilisent pas leurs actifs en mark to market, mais inscrivent les titres dans leurs livres à leur valeur d'acquisition et les amortissent tranquillement. Cela donne ensuite lieu à des gains phénoménaux ou à des pertes lorsque l'on se sépare de ces titres. D'où le caractère pitoyable des stress tests bancaires. Si les acteurs étaient responsabilisés par l'obligation d'établir un prix réaliste, les marchés s'ajusteraient plus rapidement que les agences ce qui éviterait la découverte, plus tard, de situations catastrophiques ou de risques systémiques.
Jürgen Gerke. - Avec le risque de court-termisme et de procyclicité. La nécessité de prendre en compte la fair value nous conduit en effet à comptabiliser les actifs à leur valeur au jour de la clôture de l'exercice alors même que celle-ci peut être très fluctuante et que notre passif a une maturité allant jusqu'à 70 ans. Illustration du problème posé par cette valeur au jour le jour : suite à la dégradation de la note de la France, le spread avec le Bund allemand s'est, de façon surprenante, restreint.
Comment intégrer cette volatilité lorsqu'un client nous confie son épargne avec pour horizon la retraite de ses petits-enfants ? Pourquoi n'est-il pas possible de faire autrement ? Parce que nous sommes dans une économie mondialisée et qu'il se trouve que les agences de notation sont à même de fournir des notations connues de tous. Certes, ce système n'est pas sans lacunes, mais il fonctionne. Ce que l'on peut en revanche lui reprocher, c'est d'être un oligopole.
Les notations des agences sont aussi prises comme référence obligée par les réglementations telles que Bâle III ou Solvabilité II, dont les modèles évaluent l'OAT française au même niveau que la dette grecque, ce qui est absurde. Ces régulations ne fonctionnent pas pour les États car elles sont très court-termistes. Même si l'on s'efforce d'y coller des patchs palliatifs, cela ne marchera jamais. Il faudrait trouver un dispositif applicable aux investisseurs de long terme, distinct de ce qui fonctionne à court terme et qui convient aux banques.