Intervention de Jean-Pierre Jouyet

Mission commune d'information Agences de notation — Réunion du 11 avril 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Jean-Pierre Jouyet président de l'autorité des marchés financiers amf

Jean-Pierre Jouyet, président de l'Autorité des marchés financiers (AMF) :

Comme le rapporteur, je suis persuadé qu'il est indispensable de rendre les agences de notation plus responsables. Il n'est pas normal que des agences américaines qui exercent en Europe s'abritent derrière le premier amendement de la Constitution des Etats-Unis pour nous dire qu'elles émettent de simples opinions. Le prix de l'indépendance, c'est la responsabilité. Il n'est pas concevable que les agences veuillent à la fois être indépendantes et irresponsables.

L'AMF aurait-elle pu sonner l'alarme plus tôt ? En réalité, avant 2008, nous n'avions pas les moyens d'encadrer la méthodologie des agences ni de contrôler leurs éventuels conflits d'intérêts. Le précédent commissaire européen en charge du marché intérieur, M. Charlie McCreevy, était opposé à la régulation financière, ce qui nous a fait perdre cinq années dans ce domaine. Nous ne sommes cependant pas restés inertes : responsable du bon fonctionnement des marchés financiers, l'AMF a ouvert des enquêtes sur les relations entre certains émetteurs et leurs agences de notation. Un grand émetteur français s'est plaint par exemple du traitement que lui avait infligé une agence de notation, notamment en matière de délai d'information. Nous avons mené une enquête et envoyé nos observations à l'agence. Par ailleurs, une enquête est en cours sur l'information erronée diffusée par Standard & Poor's. La directrice des enquêtes qui m'accompagne vous apportera des précisions à ce sujet.

Le agences de notation rendent possible la comparaison internationale des titres de dette, ce qui leur donne un pouvoir considérable dans le cadre de marchés financiers globalisés. Mais elles doivent être contrôlées et régulées car leur activité ne se limite pas à celle d'un thermomètre qui mesurerait un risque de défaut. Parfois, le thermomètre fait monter la fièvre. Une réforme ne peut cependant être décidée au niveau national mais seulement à l'échelle européenne.

Concernant la notation de la dette souveraine, on peut réfléchir à la création d'une fondation, qui assumerait la fonction d'un juge de paix. Vu les conséquences de la notation sur les choix démocratiques des Etats, l'instance qui les note doit être une autorité crédible et incontestable.

En tant qu'européen, je me dois enfin de réagir à votre dernière remarque concernant la nationalité des analystes qui notent la dette française. Je ne crois pas que des analystes étrangers soient moins bien placés que des Français pour noter notre dette souveraine. Je puis vous dire qu'à l'AMF nous rencontrons régulièrement des équipes du FMI, composées d'experts étrangers, qui connaissent parfaitement le dossier de la régulation des marchés financiers en France. La nationalité n'est donc pas à mes yeux un problème.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion