Intervention de Jean-Pierre Jouyet

Mission commune d'information Agences de notation — Réunion du 11 avril 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Jean-Pierre Jouyet président de l'autorité des marchés financiers amf

Jean-Pierre Jouyet, président de l'Autorité des marchés financiers (AMF) :

Je comprends ce que vous dites. Au cours de l'année écoulée, nous avons assisté à la crise de la dette souveraine, que l'on ne saurait cependant imputer entièrement aux agences de notation : il y a eu aussi des dérives de la part des Etats, des tromperies sur les comptes, tout n'est donc pas blanc ou noir.

Mais il est vrai qu'il faut davantage encadrer les agences, vérifier leur méthodologie et s'assurer que leur évaluation s'appuie bien sur les fondamentaux. Ce qui me frappe ces derniers mois, ce sont les variations de notes qui se sont produites. Or, un changement de note sur la dette souveraine a des conséquences sur l'ensemble des acteurs financiers puis sur les entreprises. Il a donc une dimension systémique, qui dépasse son effet sur la seule dette de l'Etat.

Alors que l'Italie était jugée dans une situation passable, du point de vue de la dette, en juin dernier, sa situation était considérée comme catastrophique au mois d'août ! Il n'y a pourtant pas eu de modification de ses fondamentaux. Ce qui a changé est seulement le jugement porté sur sa situation politique. Je suis de même frappé par ce qui s'est passé en début de semaine sur l'Espagne : alors que le gouvernement espagnol vient de présenter des mesures de redressement, dont on peut certes discuter, je suis surpris que les agences choisissent ce moment pour mettre ce pays sous surveillance, alors que sa situation objective n'a en rien changé.

On ne peut isoler le problème posé par les agences de la dégradation, plus générale, du fonctionnement des marchés. On est allé trop loin dans la désorganisation des marchés financiers, qui se caractérisent par l'absence de confrontation transparente de l'offre et de la demande, 50 % des transactions échappant aux régulateurs. Le rôle central occupé par les agences est un symptôme de ce dérèglement, qui peut poser un problème démocratique : les citoyens n'accepteront pas que perdurent indéfiniment des opérations de marché opaques, désordonnées, avec des effets systémiques mal compris.

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